Le Journal de Montreal

Une mère veut 1 an d’assurance-emploi

La femme atteinte d’un cancer pour une deuxième fois devra subir de la chimiothér­apie pour le reste de sa vie

- KATHRYNE LAMONTAGNE deal

SAINT-AUGUSTIN-DE-DESMAURES | Une jeune femme frappée de plein fouet par le cancer deux fois en un an lance un cri du coeur aux partis politiques fédéraux pour faire passer l’assurance-emploi de 15 à 52 semaines en cas de maladie.

« Il faut que ça change. Je parle pour mon histoire, ma vie, ma famille, mes enfants. Regardez-moi. C’est à moi que vous dites non », scande haut et fort Émilie Sansfaçon, qui habite Saint-Augustin-de-Desmaures, près de Québec.

La mère de 30 ans dénonce l’inaction du fédéral dans ce dossier, les prestation­s de maladie n’ayant subi aucune modificati­on depuis leur entrée en vigueur, en 1971.

L’assurance-emploi verse un maximum de 15 semaines de prestation­s de maladie lorsqu’une personne est incapable de travailler et qu’elle n’a pas d’assurance privée.

Dernièreme­nt, les libéraux de Justin Trudeau se sont engagés à bonifier le régime de 15 à 26 semaines s’ils sont réélus.

« Ce n’est pas suffisant, il faut un an », soutient la mère d’une fillette de 2 ans et belle-maman d’un garçon de 7 ans.

QUITTER SON EMPLOI

Mme Sansfaçon l’a appris à ses dépens. À pareille date l’an dernier, elle recevait un diagnostic de cancer colorectal. Dix jours plus tard, elle se faisait retirer les deux tiers de l’intestin, en plus de subir des traitement­s de chimiothér­apie durant six mois.

« J’avais un cancer de stade 3 », dit-elle. Elle a été forcée de quitter son emploi d’adjointe administra­tive pour cette période. Sans assurance privée, elle s’est tournée vers l’assurance-emploi.

« Et là, j’ai appris que j’avais 15 semaines. Le gouverneme­nt te donne 15 semaines pour guérir. Mais le traitement dure au moins six mois », dénonce-t-elle.

La jeune mère a dû « réhypothéq­uer » sa maison, maximiser ses marges de crédit en plus de demander de l’aide financière à sa famille.

« Je me suis mise dans la misère. Il faut que tu avec le fait que tu n’as pas d’argent qui rentre », expose-t-elle.

« LE GOUVERNEME­NT TE DONNE 15 SEMAINES POUR GUÉRIR. MAIS LE TRAITEMENT DURE AU MOINS SIX MOIS. » – Émilie Sansfaçon, malade

Moins d’une semaine après la fin de ses traitement­s, elle est retournée au travail.

« Parce que j’avais besoin de sous. Après une chimio, habituelle­ment, tu es censé avoir un trois mois de convalesce­nce, pour reprendre ta concentrat­ion, retrouver une santé normale. Je ne pouvais pas », dénonce Mme Sansfaçon.

UNE RÉCIDIVE CINQ MOIS PLUS TARD

Cinq mois plus tard, le malheur frappe à nouveau. Le cancer est revenu, plus fort. Stade 4. Les métastases ont atteint les poumons. Et ils sont inopérable­s.

Mme Sansfaçon est condamnée à avoir de la chimiothér­apie… toute sa vie. Ses jours sont comptés.

« Je ne peux plus vivre sans chimio. Je suis rendue là », admet-elle, lucide.

Les traitement­s, qui seront plus agressifs que les précédents, ont débuté cet automne. En arrêt de travail pour un an, elle n’aura droit encore qu’à 15 semaines d’assurance maladie.

« Pas une banque, pas une caisse ne veut te prêter de l’argent. Je suis accotée partout, plaide-t-elle. Je n’ai jamais demandé d’être malade. J’ai travaillé depuis l’âge de 16 ans, je l’ai payée cette assurance-là. Et là, j’ai besoin de l’aide du gouverneme­nt. »

La situation est d’autant plus ironique, souligne-t-elle, que l’assurance-emploi permet jusqu’à 45 semaines en cas de perte de boulot et 35 pour les aidants naturels.

Marie-Hélène Dubé, avec trois cancers à son actif, a lancé une pétition signée par plus de 600 000 personnes afin de faire augmenter la durée des prestation­s de maladie de l’assurance-emploi canadienne à un an. Le Nouveau Parti démocratiq­ue et les conservate­urs ont appuyé en 2018 sa propositio­n.

 ?? PHOTO JEAN-FRANÇOIS DESGAGNÉS ?? Émilie Sansfaçon se bat non seulement contre le cancer colorectal, mais aussi contre le gouverneme­nt fédéral afin de faire passer les prestation­s d’assurance-emploi de 15 à 52 semaines pour les personnes malades qui ne peuvent travailler.
PHOTO JEAN-FRANÇOIS DESGAGNÉS Émilie Sansfaçon se bat non seulement contre le cancer colorectal, mais aussi contre le gouverneme­nt fédéral afin de faire passer les prestation­s d’assurance-emploi de 15 à 52 semaines pour les personnes malades qui ne peuvent travailler.

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