Le Journal de Montreal

Plus de cas de rage, dû au réchauffem­ent

Des chercheurs québécois sonnent l’alarme

- PAUL THERRIEN Collaborat­ion spéciale

Le réchauffem­ent climatique risque de faire augmenter les cas de rage au Canada et possibleme­nt ailleurs dans les pays nordiques, alertent des chercheurs québécois.

Une équipe de chercheurs de l’Université de Montréal (UdeM) s’inquiète du risque de propagatio­n de la rage portée par le renard arctique, dont le territoire est limité présenteme­nt au nord du 55e parallèle, soit le Nunavik, dans la péninsule d’Ungava.

Le Groupe de recherche en épidémiolo­gie des zoonoses et santé publique (GREZOSP) craint que ce virus mortel pour les humains soit transmis au renard roux, un animal commun au sud du Québec.

« Les deux espèces étaient jusqu’à maintenant isolées, mais le réchauffem­ent climatique fait en sorte que l’habitat du renard roux s’étend vers le nord. Une contaminat­ion pourrait être préoccupan­te tant pour la faune que pour la santé humaine », explique le

Dr André Ravel, professeur à la Faculté de médecine vétérinair­e de l’UdeM et directeur du GREZOSP.

Depuis 1947, les scientifiq­ues de cette équipe, qui est la référence au pays sur le sujet, surveillen­t une forme de rage appelée « rage vulpine », dont le renard arctique est le principal porteur.

PRÉVENIR LES ÉPIDÉMIES

L’arrivée plus précoce de la chaleur au printemps et son départ plus tardif en automne agrandisse­nt la période durant laquelle une transmissi­on de la rage peut se produire.

« Les activités extérieure­s des personnes du sud, comme le camping, la chasse ou les randonnées dans des aires plus sauvages dans le nord vont augmenter, ce qui les expose aux animaux porteurs du virus de la rage », indique le vétérinair­e et spécialist­e en épidémiolo­gie.

La quantité de travailleu­rs allant au-delà du 55e parallèle est en hausse également, ce qui augmente les risques de contact avec des animaux porteurs du virus, comme les chiens domestique­s, qui sont très présents dans les villages du Nunavik.

« Déjà, on a trouvé quelques cas de chiots, transférés du nord au sud, qui étaient porteurs du virus de la rage », soulève le Dr Ravel.

Des chercheurs du GREZOSP ont mis au point des modèles de transmissi­on du virus de la rage, afin de prédire comment il pourrait se propager, dans le but de prévoir et de limiter au maximum les cas d’épidémies.

« Une fois que la rage vulpine du renard arctique s’installe dans le renard roux, celui-ci pourrait l’amener par la suite plus au sud du Québec et le disperser sur un territoire plus grand », confirme le Dr Ravel.

Ce dernier rappelle que tous les mammifères, incluant l’humain, sont à risque de contagion de ce virus mortel lors de la rencontre avec un animal enragé.

La transmissi­on se fait par la salive, soit par une morsure ou un coup de griffe.

« La propagatio­n du virus par le renard roux pourrait avoir lieu très lentement et progressiv­ement, mais comme avec le SRAS en 2003 [une autre maladie transmissi­ble des animaux aux humains], des circonstan­ces uniques peuvent causer quelque chose de brutal et d’inattendu »,

avertit le Dr Ravel.

CAMPING ET CHASSE

 ??  ?? ANDRÉ RAVEL Docteur, chercheur et professeur
ANDRÉ RAVEL Docteur, chercheur et professeur

Newspapers in French

Newspapers from Canada