Le Journal de Montreal

Les Kurdes s’allient avec Damas pour contrer l’offensive turque

L’armée déployée à la frontière alors que les troupes américaine­s se retirent

- Facto de

QAMICHLI | (AFP) Les Kurdes de Syrie, lâchés par Washington, ont annoncé hier soir avoir conclu un accord avec Damas pour le déploiemen­t de l’armée syrienne dans le nord du pays, afin de s’opposer à l’avancée rapide des troupes turques et de leurs alliés.

L’offensive turque, lancée il y a cinq jours à la faveur d’un retrait américain et malgré de vives critiques internatio­nales, vise à instaurer une « zone de sécurité » de 32 km de profondeur pour séparer sa frontière des territoire­s contrôlés par les Unités de protection du peuple (YPG), une milice qualifiée de « terroriste » par Ankara.

Cette « zone » serait susceptibl­e d’accueillir une partie des 3,6 millions de Syriens actuelleme­nt réfugiés en Turquie, une des nombreuses conséquenc­es du conflit qui ravage la Syrie depuis 2011.

TROUPES SYRIENNES

Hier, le régime de Bachar al-Assad, qui entretient des rapports tendus avec la minorité kurde mais a dénoncé l’opération d’Ankara, a annoncé l’envoi de troupes dans le Nord pour « affronter » l’« agression » turque.

Peu après, les Kurdes, qui ont instauré ces dernières années une autonomie

sur de vastes régions du Nord et du Nord-est syrien, ont dit avoir conclu un accord avec Damas pour un déploiemen­t de l’armée syrienne près de la frontière « en soutien aux Forces démocratiq­ues syriennes (FDS) », dominées par les YPG.

« ABANDONNÉS » PAR LES ÉTATS-UNIS

Partenaire­s de longue date des Occidentau­x dans la lutte contre le groupe État islamique (EI), les FDS ont accusé l’Amérique de Donald Trump de les avoir abandonnée­s en retirant lundi dernier des soldats de zones frontalièr­es puis en annonçant hier le retrait de près de 1000 soldats du Nord syrien.

Cette décision du dirigeant républicai­n a également provoqué la consternat­ion dans les rangs de l’opposition américaine.

Donald Trump « défait des années de travail pour endiguer l’EI », a dénoncé le chef de la minorité démocrate au Sénat, Chuck Schumer.

Les forces kurdes ont en outre annoncé hier la fuite de près de 800 proches de djihadiste­s de l’EI d’un camp de déplacés, qui ont profité selon elles du chaos sécuritair­e créé par l’offensive turque.

L’offensive d’Ankara devait d’abord se concentrer sur une bande de territoire frontalièr­e, entre les villes de Tal Abyad et Ras al-Aïn, distantes d’environ 120 km.

Hier, les forces turques ont conquis Tal Abyad, selon l’agence turque Anadolu et l’Observatoi­re syrien des droits de l’Homme (OSDH).

Ras al-Aïn échappe encore aux forces turques, mais celles-ci se sont emparées de 40 villages depuis mercredi et « ont conquis toute la région frontalièr­e, de Tal Abyad jusqu’à l’ouest de Ras al-Aïn », selon l’ONG.

Les combats et les bombardeme­nts turcs ou de leurs supplétifs ont été violents hier, tuant au moins 26 civils selon l’OSDH.

UN COMPROMIS « DOULOUREUX »

Depuis mercredi, 104 combattant­s kurdes et plus de 60 civils ont été tués dans les violences, selon un dernier bilan de l’OSDH.

Pour justifier l’accord entre les Kurdes et Damas, le haut-commandant des FDS Mazloum Abdi a déclaré sur Foreign Policy que le régime syrien et son allié russe avaient « fait des propositio­ns qui pourraient sauver la vie de millions de personnes ».

« Nous savons que nous devrons faire des compromis douloureux », mais entre les compromis et le génocide de notre peuple, nous choisirons la vie », a-t-il dit.

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PHOTO AFP Des soldats pro-turcs défilent à Tal Abyad, conquise hier par Ankara selon l’Observatoi­re syrien des droits de l’homme.

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