Le Journal de Montreal

Sauvé par son look

- NATHALIE ELGRABLY-LEVY nathalie.elgrably @quebecorme­dia.com

« Un beau visage est un avantage préférable à toutes les lettres de recommanda­tion », disait Aristote. À en juger par les résultats de l’élection, il peut également paralyser les facultés cognitives des électeurs !

Lorsque Trudeau s’est présenté aux élections de 2015, son parcours profession­nel était d’une médiocrité abyssale en regard du poste convoité. Si nous étions dans une méritocrat­ie véritable, sa candidatur­e aurait été moquée. Pourtant, il a remporté les élections. Et il a miraculeus­ement renouvelé l’exploit en dépit d’une succession de frasques et de scandales, certes étouffés, mais qui aurait dû mener à l’écoeuremen­t.

PASSÉ

Chaque fois, Trudeau est sauvé par son look. Manifestem­ent, la méritocrat­ie, c’est du passé. Les capacités intellectu­elles, la vision, la sagesse, l’intégrité et le sérieux sont maintenant des reliques de la politique d’antan. Depuis 2015, les élections sont travesties en concours de beauté. On juge le corps, voire le « cul », mais rarement le QI ! Nous sommes à l’ère de l’esthéticoc­ratie.

Certes, l’image est importante. Soigner son apparence, c’est respecter son entourage. Mais lorsque l’esthétique devient le facteur de sélection primordial, lorsqu’on obéit aveuglémen­t à l’injonction de la beauté, c’est le signe d’une société schizophrè­ne devenue otage d’une spirale funeste.

DISCRIMINA­TION

Schizophrè­ne, parce qu’elle cautionne la sélection selon l’esthétique, alors qu’elle prétend exécrer toute forme de discrimina­tion en fonction d’attributs physiques comme le sexe, l’âge, ou la race. Cherchez l’erreur !

Otage, parce que la beauté n’est garante d’aucune des qualités indispensa­bles à un chef d’État. Trudeau a même prouvé que le capital de séduction d’un candidat peut s’avérer inversemen­t proportion­nel à ses compétence­s.

C’est facile de choisir le « beau ». C’est peut-être même rassurant. Mais l’impérialis­me esthétique a un coût politique et sociétal. Des électeurs ont confondu être et paraître ; d’autres ont choisi le superficie­l plutôt que l’essentiel. La démocratie a parlé. Soit ! Mais au final, on a les politicien­s qu’on mérite !

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