Le Journal de Montreal

Un nationalis­te à la croisée des chemins

Dans Robert Bourassa et nous, 45 personnali­tés publiques se confient sur l’ex-premier ministre libéral

- PATRICK BELLEROSE Bureau parlementa­ire

Robert Bourassa aurait pu mener le Québec à la souveraine­té après l’échec de Meech, mais il a fait son choix, estime l’analyste Marie Grégoire, qui a rencontré une multitude d’acteurs politiques l’ayant côtoyé pour la rédaction du livre Robert Bourassa et nous.

Dans l’ouvrage, rédigé en compagnie du spécialist­e des communicat­ions Pierre Gince, 45 personnali­tés publiques racontent les grands moments du règne de ce premier ministre qui demeure largement méconnu des Québécois.

Ces regards croisés permettent notamment de mettre en lumière les réactions – diamétrale­ment opposées – des fédéralist­es et souveraini­stes à sa déclaratio­n post-Meech. « […] quoi qu’on dise et quoi qu’on fasse, le Québec est, aujourd’hui et pour toujours, une société distincte, libre et capable d’assurer son destin et son développem­ent », avait alors affirmé le premier ministre libéral au Salon bleu, après le rejet des conditions du Québec pour réintégrer la Constituti­on canadienne.

UN SOUVERAINI­STE ?

Alors que la formule n’a pas « empêché de dormir » l’ex-ministre fédéral Marc Lalonde, proche de Pierre Elliott Trudeau, des indépendan­tistes comme

Yves Michaud y ont plutôt vu un premier pas vers la souveraine­té.

À l’intérieur du caucus libéral, plusieurs collègues ont également cru que M. Bourassa était prêt rebuté. à rompre les liens avec le Canada, raconte Liza Frulla, alors ministre dans son gouverneme­nt.

« À la suite de la déclaratio­n de M. Bourassa et de la main tendue de monsieur Parizeau, plusieurs de mes collègues libéraux et moi-même étions prêts à plonger pour suivre M. Bourassa jusqu’à un référendum, si nécessaire », raconte-t-elle.

D’ailleurs, « il est le seul premier ministre qui aurait pu réussir la démarche avec autant de certitude […] », estime l’ex-premier ministre péquiste Lucien Bouchard.

Mais M. Bourassa lui a un jour confié ce qui l’avait

« Il me répondit, essentiell­ement : “Je ne l’ai pas fait en raison de mon sens des responsabi­lités envers les jeunes du Québec. Je n’ai pas voulu les exposer aux dérapages qui pouvaient suivre un référendum réussi. La turbulence économique aurait été extrêmemen­t sévère, notamment sur les cours de la monnaie, des obligation­s du Québec, etc.” », raconte M. Bouchard.

PERSONNAGE COMPLEXE

Pour Marie Grégoire, cet épisode illustre la personnali­té complexe de Robert Bourassa. « Il ne mettait jamais tout son jeu sur la table », raconte celle qui l’a connu comme jeune militante libérale, avant de suivre Mario Dumont à l’ADQ.

Toutefois, même si elle estime qu’il aurait pu réussir la souveraine­té du Québec, l’analyste politique ne croit pas que M. Bourassa cachait des velléités indépendan­tistes. « Il a eu le choix, et il a fait son choix », estime-t-elle.

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1. Le 25 juin 1990, le premier ministre du Québec, Robert Bourassa, tenait une conférence de presse à la suite de l’annonce de l’échec de l’accord du lac Meech. 2. Robert Bourassa reçoit un accueil triomphal lors d’un vote de confiance le 29 août 1992, au congrès spécial du Parti libéral du Québec. 3. Robert Bourassa lors de la campagne référendai­re sur l’accord de Charlottet­own, le 27 septembre 1992.
PHOTOS D’ARCHIVES 1 1. Le 25 juin 1990, le premier ministre du Québec, Robert Bourassa, tenait une conférence de presse à la suite de l’annonce de l’échec de l’accord du lac Meech. 2. Robert Bourassa reçoit un accueil triomphal lors d’un vote de confiance le 29 août 1992, au congrès spécial du Parti libéral du Québec. 3. Robert Bourassa lors de la campagne référendai­re sur l’accord de Charlottet­own, le 27 septembre 1992.
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ROBERT BOURASSA ET NOUS Marie Grégoire et Pierre Gince Les éditions de l’homme 30 octobre 2019

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