Augmentations légitimes et mauvaises promesses
Ça tranche en effet avec le scénario des dernières décennies où les demandes devaient être ultra raisonnables et où le gouvernement finissait quand même parfois par imposer les conditions de travail (pensons à 2006).
La donne a changé : « C’est la première fois que je commence une négociation et que le gouvernement ne pourra pas […] dire qu’il n’a pas d’argent », a fait remarquer, jeudi, Carolle Dubé, présidente de l’APTS.
CHANCEUX !
On le sait, dans les dernières années, les libéraux ont comprimé les dépenses au moment où l’économie du Québec entrait dans un cycle favorable. Résultat : le Québec n’a peut-être jamais eu une marge de manoeuvre financière aussi grande.
Je suis retombé hier sur des images du 5 octobre 2018, jour de la passation des pouvoirs entre Philippe Couillard et François Legault. Historique : un nouveau premier ministre remerciait son prédécesseur pour lui avoir laissé « la maison en ordre ». M. Couillard avait même lancé : « T’es chanceux pas mal ! »
Dans ce contexte, François Legault devrait envisager d’importants rattrapages salariaux, attendus depuis longtemps. Si on ne le fait pas maintenant, quand le fera-t-on ? Les syndicats l’ont compris et l’attendent au détour. Le premier ministre a de son côté raison de rappeler que « les surplus n’appartiennent pas aux syndicats », et que l’État québécois reste très endetté. Une négociation s’engage.
Toutefois, pour plusieurs catégories d’emplois dans le secteur public, il faut y penser. Les infirmiers et infirmières ont regardé cette dernière décennie les médecins recevoir des hausses de rémunération gargantuesques alors qu’eux subissaient les effets de la rigueur budgétaire.
Dans plusieurs autres secteurs de l’État, on ne cesse de dire qu’il faut de manière urgente rapatrier et retenir l’expertise : en informatique et au ministère des Transports, entre autres.
D’autres métiers mériteraient des augmentations exceptionnelles afin de les revaloriser. Une des premières idées mises en avant par M. Legault lorsqu’il a lancé la CAQ était d’augmenter le salaire des enseignants de
20 % en contrepartie d’évaluations en bonne et due forme.
DÉJÀ PRIVILÉGIÉS ?
J’entends certains d’entre vous rager : les conditions de travail globales des employés du public sont plus avantageuses qu’on ne le dit. Un travailleur autonome doit nourrir de façon sacrificielle ses REER s’il veut se donner quelque chose comme l’équivalent d’un RREGOP (Régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics).
Et puis, comment financer les hausses de salaire ? Alors qu’aucun cycle de croissance n’est éternel. Gouverner, c’est choisir. Certains engagements des caquistes sont douteux et les sommes qu’ils mobiliseraient pourraient être
mieux investies (le 3e lien par exemple).
Cette semaine, Jean Charest, lors d’une conférence, a eu cette phrase pleine de sagesse qu’il aurait dû, de son propre aveu, appliquer à son engagement de permettre les défusions municipales : « Les bons gouvernements renient leurs mauvaises promesses ».
À méditer.