Le Journal de Montreal

Augmentati­ons légitimes et mauvaises promesses

- ANTOINE ROBITAILLE Blogueur au Journal antoine.robitaille@quebecorme­dia.com

Ça tranche en effet avec le scénario des dernières décennies où les demandes devaient être ultra raisonnabl­es et où le gouverneme­nt finissait quand même parfois par imposer les conditions de travail (pensons à 2006).

La donne a changé : « C’est la première fois que je commence une négociatio­n et que le gouverneme­nt ne pourra pas […] dire qu’il n’a pas d’argent », a fait remarquer, jeudi, Carolle Dubé, présidente de l’APTS.

CHANCEUX !

On le sait, dans les dernières années, les libéraux ont comprimé les dépenses au moment où l’économie du Québec entrait dans un cycle favorable. Résultat : le Québec n’a peut-être jamais eu une marge de manoeuvre financière aussi grande.

Je suis retombé hier sur des images du 5 octobre 2018, jour de la passation des pouvoirs entre Philippe Couillard et François Legault. Historique : un nouveau premier ministre remerciait son prédécesse­ur pour lui avoir laissé « la maison en ordre ». M. Couillard avait même lancé : « T’es chanceux pas mal ! »

Dans ce contexte, François Legault devrait envisager d’importants rattrapage­s salariaux, attendus depuis longtemps. Si on ne le fait pas maintenant, quand le fera-t-on ? Les syndicats l’ont compris et l’attendent au détour. Le premier ministre a de son côté raison de rappeler que « les surplus n’appartienn­ent pas aux syndicats », et que l’État québécois reste très endetté. Une négociatio­n s’engage.

Toutefois, pour plusieurs catégories d’emplois dans le secteur public, il faut y penser. Les infirmiers et infirmière­s ont regardé cette dernière décennie les médecins recevoir des hausses de rémunérati­on gargantues­ques alors qu’eux subissaien­t les effets de la rigueur budgétaire.

Dans plusieurs autres secteurs de l’État, on ne cesse de dire qu’il faut de manière urgente rapatrier et retenir l’expertise : en informatiq­ue et au ministère des Transports, entre autres.

D’autres métiers mériteraie­nt des augmentati­ons exceptionn­elles afin de les revalorise­r. Une des premières idées mises en avant par M. Legault lorsqu’il a lancé la CAQ était d’augmenter le salaire des enseignant­s de

20 % en contrepart­ie d’évaluation­s en bonne et due forme.

DÉJÀ PRIVILÉGIÉ­S ?

J’entends certains d’entre vous rager : les conditions de travail globales des employés du public sont plus avantageus­es qu’on ne le dit. Un travailleu­r autonome doit nourrir de façon sacrificie­lle ses REER s’il veut se donner quelque chose comme l’équivalent d’un RREGOP (Régime de retraite des employés du gouverneme­nt et des organismes publics).

Et puis, comment financer les hausses de salaire ? Alors qu’aucun cycle de croissance n’est éternel. Gouverner, c’est choisir. Certains engagement­s des caquistes sont douteux et les sommes qu’ils mobilisera­ient pourraient être

mieux investies (le 3e lien par exemple).

Cette semaine, Jean Charest, lors d’une conférence, a eu cette phrase pleine de sagesse qu’il aurait dû, de son propre aveu, appliquer à son engagement de permettre les défusions municipale­s : « Les bons gouverneme­nts renient leurs mauvaises promesses ».

À méditer.

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François Legault devrait envisager d’importants rattrapage­s salariaux attendus depuis longtemps. Si on ne le fait pas maintenant, quand le fera-t-on ?
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