Le Journal de Montreal

DE VIEUX COMPTES À RÉGLER

Série de meurtres dans le crime organisé

- ERIC THIBAULT ET FÉLIX SÉGUIN Le Journal de Montréal et Bureau d’enquête

Le chef de clan mafieux tué lundi dernier, dans l’ouest de Montréal, avait reçu un sobriquet en référence à une douloureus­e technique qu’il préconisai­t pour récupérer l’argent qu’on lui devait.

Andrew Scoppa était surnommé « The Broom » – « Le Balai », en anglais – dans le milieu interlope montréalai­s.

Le mafioso d’origine calabraise forçait ses débiteurs à s’agenouille­r sur le bâton arrondi tout en gardant les mains croisées derrière la tête.

Et ce, tant et aussi longtemps qu’ils n’avaient pas trouvé une façon de rembourser à court terme tout le fric qu’ils lui devaient, d’après nos sources.

La génuflexio­n imposée pouvait durer des heures et ainsi passer d’inconforta­ble à insupporta­ble.

Cette méthode de recouvreme­nt avait l’avantage d’être appliquée sans effusion de sang et sans os fracturés, contrairem­ent aux violentes raclées que certains mafiosi, enregistré­s à leur insu lors de l’opération Colisée, se vantaient d’avoir infligées à des individus incapables de les rembourser.

GROSSE POINTURE

Andrew Scoppa s’était hissé au rang des poids lourds du crime organisé de souche italienne en menant ses affaires à sa manière.

La police l’a même considéré comme un chef intérimair­e de la mafia montréalai­se en 2016, même si elle l’avait enregistré en train de dire qu’il n’était pas intéressé à en devenir le « boss ».

Qualifié de « trafiquant notoire » par les tribunaux il y a 20 ans, il ne s’était pas mêlé des luttes de pouvoir meurtrière­s qui ont alors décimé la mafia, pendant que le parrain Vito Rizzuto était incarcéré pour son rôle dans trois meurtres aux États-Unis.

Il a toutefois été assez proche du défunt parrain Rizzuto qui, à son retour au pays en 2012, lui avait accordé une grosse faveur.

Des mafieux qui projetaien­t d’éliminer l’intempesti­f caïd Salvatore Scoppa, frère cadet d’Andrew, n’avaient pas réussi à obtenir la permission du parrain pour aller de l’avant, selon nos sources.

L’HOMME DES SICILIENS

Après le décès du parrain, en décembre 2013, « Sal » Scoppa serait ensuite devenu l’un des hommes de main des Siciliens. Les policiers le soupçonnai­ent d’avoir perpétré des meurtres pour le compte du clan Rizzuto.

Mais à l’automne 2015, les frères Scoppa ont su que les nouveaux leaders du clan Rizzuto les soupçonnai­ent d’être des « taupes » et qu’ils parlaient d’éliminer Salvatore.

Le 16 octobre, l’Escouade nationale de répression du crime organisé (ENRCO) arrêtait quatre présumés tueurs accusés d’autant de meurtres commis en 2016 aux dépens du clan Rizzuto. C’est Salvatore Scoppa qui dirigeait ce commando.

Il aurait lui aussi été arrêté s’il n’avait pas été criblé de balles dans un hôtel de Laval, le 4 mai dernier.

Andrew Scoppa n’avait pas été arrêté à la suite de cette enquête de l’ENRCO. Mais il savait que sa vie était en danger et projetait de fuir à l’étranger sous peu.

Bien qu’il changeait souvent de véhicule pour se déplacer, le mafioso n’avait pas changé sa routine d’entraîneme­nt.

Lundi dernier, le maniaque de culture physique attendait l’ouverture de son gymnase habituel à Pierrefond­s quand un tireur l’a tué d’une balle à la tête.

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Un policier tente de réanimer Salvatore Scoppa après qu’il ait été abattu, à l’hôtel Sheraton de Laval, le 4 mai dernier.
PHOTO D’ARCHIVES PHOTO D’ARCHIVES Le corps sans vie d’Andrew Scoppa, recouvert d’une couverture, après le meurtre de lundi dernier. Un policier tente de réanimer Salvatore Scoppa après qu’il ait été abattu, à l’hôtel Sheraton de Laval, le 4 mai dernier.
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ANDREW SCOPPA Victime
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