Le Journal de Montreal

Un projet d’abattoir adapté aux petits producteur­s

Ils sont excédés de faire des centaines de kilomètres pour tuer leur volaille

- MARIE-ÈVE DUMONT La ferme et son État

Des petits producteur­s excédés de faire des centaines de kilomètres pour abattre leur volaille se regroupent pour créer un abattoir et ainsi améliorer le bien-être de leurs animaux.

« Il y a de moins en moins d’abattoirs, mais il y a une volonté pour les petits producteur­s de faire plus d’oies ou de canards », explique Fernande Ouellet, propriétai­re de la ferme Rusé comme un canard à Granby, en Montérégie, et une des instigatri­ces du projet.

Il n’y a qu’un seul abattoir dans la province qui s’occupe des oies. Mme Ouellet doit faire plus de 1200 km, soit deux allers-retours entre sa ferme à Granby et l’abattoir situé à l’Île-d’Orléans, pour faire abattre ses oiseaux et ramener la viande.

Ces déplacemen­ts entraînent des coûts et augmentent l’impact écologique de sa production, alors que l’élevage est de plus en plus pointé du doigt pour ses effets dommageabl­es sur l’environnem­ent.

C’est pour répondre à ces préoccupat­ions qu’est né le projet du Petit abattoir, coop de solidarité. Cette coopérativ­e réunit des éleveurs, mais aussi des consommate­urs, restaurate­urs et bouchers qui veulent encourager ce type d’agricultur­e.

Les instigateu­rs souhaitent installer l’abattoir dans quatre grands conteneurs dans le quartier industriel de Granby. Quelque 800 volailles y seront abattues chaque jour plutôt que 1200 à l’heure, comme c’est le cas dans les abattoirs industriel­s. Un cours en abattage sera aussi offert dans une école de formation profession­nelle non loin du site.

ABATTOIR ADAPTÉ

« La Montérégie, c’est le gros noyau de production agricole au Québec et on n’a pas accès à des abattoirs qui sont adaptés à notre réalité de petits producteur­s, dit l’éleveuse. Il en existe des plus industriel­s, pour qui on est des paquets de troubles parce qu’on fait de petits lots et que nos animaux ont différents gabarits. Comment on fait alors pour satisfaire cette nouvelle demande sociétale tant en matière de bienêtre animal que de questionne­ment environnem­ental ? » se demande-t-elle.

La réalité est la même dans le reste du milieu de la volaille ou dans celui de la viande rouge pour les producteur­s à petite échelle, assure-t-elle.

Les grands producteur­s, eux, arrivent à faire abattre et dépecer leurs animaux dans de grosses installati­ons ici ou aux États-Unis.

TRAÇABILIT­É DOUTEUSE

D’ailleurs, bien des producteur­s industriel­s de volailles ne connaissen­t pas le chemin exact que prennent leurs animaux entre le moment où ils partent à l’abattoir et celui où ils se retrouvent dans le comptoir à l’épicerie, soutient Marc Séguin, artiste et réalisateu­r du documentai­re et cofondateu­r du projet.

« Je pense que l’on serait surpris parfois de savoir le circuit du poulet. On ne sait pas où il a été abattu, puis transformé, puis salé, puis découpé ; comme consommate­ur, on en perd un peu la trace aussi », s’inquiète M. Séguin.

Les fondateurs ont lancé une campagne de sociofinan­cement sur le site de La Ruche Québec pour aider à amasser la mise de fonds du projet qui devrait coûter 500 000 $.

 ?? PHOTO MARIE-ÈVE DUMONT ?? Fernande Ouellet, productric­e de canards et d’oies, et Marc Séguin, artiste et réalisateu­r du documentai­re La ferme et son État, font partie des instigateu­rs du projet du Petit abattoir, coop de solidarité.
PHOTO MARIE-ÈVE DUMONT Fernande Ouellet, productric­e de canards et d’oies, et Marc Séguin, artiste et réalisateu­r du documentai­re La ferme et son État, font partie des instigateu­rs du projet du Petit abattoir, coop de solidarité.

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