Pas de suivi chaque fois
Malgré de tout nouveaux pouvoirs de surveillance, l’Autorité des marchés publics (AMP) compte encore beaucoup sur la dénonciation du public pour épingler les entreprises délinquantes. Ces dernières ont la partie facile, déplorent des experts.
Depuis janvier, c’est l’AMP qui gère le RENA et qui surveille les marchés publics. La création de cet organisme était la première recommandation de la commission Charbonneau, qui souhaitait que la police des contrats ait plus de mordant.
Questionnée par notre Bureau d’enquête, l’AMP a refusé de dire si elle assurait un suivi systématique des actionnaires de firmes inscrites au RENA.
L’organisme procède à des vérifications si elle a des doutes ou si elle reçoit une nouvelle information, nous a dit la porte-parole Karine Primard.
PLUSIEURS FAILLES
Un propriétaire condamné et dont l’entreprise est sur la liste noire pourrait donc démarrer une nouvelle entreprise et obtenir des contrats publics, sans être épinglé par l’AMP.
L’absence de suivi systématique inquiète certains observateurs.
« C’est un registre provincial et les municipalités tiennent pour acquis que l’information y est exacte et à jour. […] J’ai beaucoup d’empathie pour les directeurs de travaux publics qui doivent s’arranger pour ne pas être floués. Ça ne doit pas être facile », souligne Étienne Charbonneau, professeur à l’ÉNAP.
« C’est leur job, aux corrompus, de trouver des failles dans le système pour les exploiter », fait remarquer Denis St-Martin, professeur en politique à l’Université de Montréal.
PAS LA FAUTE DE QUÉBEC INC
Par exemple, les propriétaires d’entreprises coupables d’infractions, mais qui n’ont pas personnellement été condamnées, ne sont pas touchés par l’interdiction d’obtenir des contrats publics.
« S’il y a des crimes qui sont commis, ce n’est pas le numéro Québec inc. qui les commet, ce sont des personnes. Pourtant, si elles ne sont pas condamnées, elles peuvent créer d’autres entreprises et ces entreprises-là pourraient tout à fait obtenir des contrats publics », déplore Martine Valois, professeure en droit et membre du comité de suivi des recommandations de la commission Charbonneau.
L’équipe d’enquête de l’AMP est en train d’être formée et comptera à terme 60 employés à terme, selon la porte-parole.