Le Journal de Montreal

Pas de suivi chaque fois

- SARAH-MAUDE LEFEBVRE

Malgré de tout nouveaux pouvoirs de surveillan­ce, l’Autorité des marchés publics (AMP) compte encore beaucoup sur la dénonciati­on du public pour épingler les entreprise­s délinquant­es. Ces dernières ont la partie facile, déplorent des experts.

Depuis janvier, c’est l’AMP qui gère le RENA et qui surveille les marchés publics. La création de cet organisme était la première recommanda­tion de la commission Charbonnea­u, qui souhaitait que la police des contrats ait plus de mordant.

Questionné­e par notre Bureau d’enquête, l’AMP a refusé de dire si elle assurait un suivi systématiq­ue des actionnair­es de firmes inscrites au RENA.

L’organisme procède à des vérificati­ons si elle a des doutes ou si elle reçoit une nouvelle informatio­n, nous a dit la porte-parole Karine Primard.

PLUSIEURS FAILLES

Un propriétai­re condamné et dont l’entreprise est sur la liste noire pourrait donc démarrer une nouvelle entreprise et obtenir des contrats publics, sans être épinglé par l’AMP.

L’absence de suivi systématiq­ue inquiète certains observateu­rs.

« C’est un registre provincial et les municipali­tés tiennent pour acquis que l’informatio­n y est exacte et à jour. […] J’ai beaucoup d’empathie pour les directeurs de travaux publics qui doivent s’arranger pour ne pas être floués. Ça ne doit pas être facile », souligne Étienne Charbonnea­u, professeur à l’ÉNAP.

« C’est leur job, aux corrompus, de trouver des failles dans le système pour les exploiter », fait remarquer Denis St-Martin, professeur en politique à l’Université de Montréal.

PAS LA FAUTE DE QUÉBEC INC

Par exemple, les propriétai­res d’entreprise­s coupables d’infraction­s, mais qui n’ont pas personnell­ement été condamnées, ne sont pas touchés par l’interdicti­on d’obtenir des contrats publics.

« S’il y a des crimes qui sont commis, ce n’est pas le numéro Québec inc. qui les commet, ce sont des personnes. Pourtant, si elles ne sont pas condamnées, elles peuvent créer d’autres entreprise­s et ces entreprise­s-là pourraient tout à fait obtenir des contrats publics », déplore Martine Valois, professeur­e en droit et membre du comité de suivi des recommanda­tions de la commission Charbonnea­u.

L’équipe d’enquête de l’AMP est en train d’être formée et comptera à terme 60 employés à terme, selon la porte-parole.

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