Le Journal de Montreal

La police a enquêté sur la théorie du pont d’or

Un livre de notre Bureau d’enquête révèle les allégation­s transmises à l’UPAC sur le Parti libéral de Jean Charest

- ALEXANDRE ROBILLARD

Avant de verser un salaire de 75 000 $ à Jean Charest, le Parti libéral du Québec aurait remboursé une partie de l’hypothèque de sa maison de Westmount.

Ces informatio­ns ont été obtenues par les enquêteurs de l’Unité permanente anticorrup­tion (UPAC) dans le cadre du projet Mâchurer, qui s’intéresse à des allégation­s de financemen­t illégal au Parti libéral du Québec (PLQ).

Un des aspects de cette enquête consistait à faire la lumière sur un pont d’or qui aurait été offert à M. Charest pour l’inciter à devenir chef de la formation en 1998.

Une des confidence­s reçues par les enquêteurs provient de Ronald Poupart, qui était directeur de cabinet de M. Charest à cette époque.

Lors d’une rencontre avec les policiers en septembre 2014,

M. Poupart leur a parlé d’un soutien financier concret qui aurait été offert au chef libéral, pendant qu’il était dans l’opposition à Québec.

« J’ai su par l’entremise de Joël Gauthier [le directeur général du PLQ à cette époque] que Jean Charest, alors chef de l’opposition, se faisait payer son hypothèque résidentie­lle, ou en partie, par le PLQ », a raconté M. Poupart aux enquêteurs.

ÉTHIQUE

Selon les policiers, M. Poupart, qui a été en poste de 2000 à 2004, n’a n’avancé aucun chiffre sur la valeur de ce soutien financier.

Mais des informatio­ns publiques indiquent que les paiements hypothécai­res de M. Charest totalisaie­nt 32 553,48 $ par année au moment de l’achat de sa résidence, en 1999, au prix de 539 000 $.

Mal à l’aise devant cet avantage que le PLQ aurait versé à M. Charest, M. Poupart s’en est ouvert à l’époque à l’homme d’affaires Marc Bibeau, un bénévole très actif dans le financemen­t libéral.

Selon M. Poupart, la formation politique devait faire preuve de plus de transparen­ce avec ce qui avait tout l’air d’un revenu versé à M. Charest.

« J’en ai alors parlé à Marc Bibeau qu’éthiquemen­t, c’était difficile à accepter, et que le parti devrait lui verser un salaire à la place. Ce qui a été fait », a raconté M. Poupart aux enquêteurs de l’UPAC.

Ce n’est qu’en 2008 que le PLQ a admis qu’il versait à M. Charest un salaire de 75 000 $ depuis 10 ans, en plus de la rémunérati­on qu’il recevait comme premier ministre.

« AFFAIRES DE PARTI »

Cinq ans après avoir parlé aux policiers de l’UPAC dans le cadre de l’enquête Mâchurer, M. Poupart s’est montré beaucoup plus réservé lorsque notre Bureau d’enquête l’a joint au téléphone.

Il a soutenu n’avoir jamais entendu parler de quoi que ce soit à propos des sommes que le PLQ aurait pu verser à son chef. « Ça, c’est vraiment des affaires de parti. Je ne me suis jamais mêlé de ça. On ne m’a jamais expliqué de A à Z cette histoire-là. »

Questionné à son tour, le DG du parti de 1999 à 2003, Joël Gauthier, a assuré n’avoir aucune informatio­n à ce sujet.

« Honnêtemen­t, je m’en rappellera­is, a-t-il dit en entrevue. C’est assez gros, je l’aurais su. »

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RONALD POUPART Ex-chef de cabinet de Jean Charest

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