Les tentacules de l’État
Vous pensiez peut-être que l’Halloween était une fête appartenant à tous, indépendante des pouvoirs de l’État. Une journée inscrite au calendrier où par coutume on aime se déguiser, une simple journée qui offre aux enfants l’occasion de partir à la chasse aux gâteries.
Une fête du domaine privé où chaque individu et chaque famille fait ce qui lui plaît en toute liberté.
La gestion de l’Halloween 2019 nous rappelle comment l’État entre petit à petit dans tous les recoins de la vie
Il semble bien que ce ne soit plus le cas. Au fil des ans, les municipalités se sont de plus en plus engagées dans la collecte des friandises. Au nom de la sécurité des enfants, on a déployé les policiers, et même les pompiers, pour sillonner les rues dans la soirée du 31 octobre.
L’ÉTAT S’EN MÊLE OU S’EMMÊLE ?
Puis voilà qu’un jour où la météo ne s’annonce pas trop clémente pour la soirée des citrouilles, des municipalités décrètent le report de l’Halloween ! À 24 heures de préavis, des élus locaux statuent que l’Halloween 2019 ne se tiendra pas le 31 octobre. Le mouvement fait boule de neige, à tel point que le Québec se trouve divisé en deux.
L’Halloween appartient-elle aux municipalités ? Allons vérifier. La Constitution canadienne ne prévoit rien en la matière ! Cette fête serait de juridiction municipale ? Mais les bonbons, c’est la santé ! Alors juridiction des provinces ? À bien y penser, au Canada, notre premier ministre est le roi du déguisement. Il n’abdiquera jamais la juridiction du fédéral sans contester !
Poussons à fond la logique de l’Halloween aspirée dans l’univers de la bureaucratie québécoise. Le constat découlant des festivités complexes de cette année sera sévère. Des différences entre une ville et sa voisine ! De la confusion ! Quelqu’un aurait peut-être pris des risques avec la sécurité des enfants ? Conclusion : on ne pourra plus désormais laisser une fête comme celle-là faire l’objet d’une telle improvisation.
Pour éviter qu’un semblable embrouillamini se reproduise, nous pourrions créer une nouvelle société d’État : Halloween Québec. Une organisation qui devrait avoir un siège social, des employés, un service des communications et tout le reste. Quelques millions de dollars bien investis pour régler une crise de société. Vingt ans plus tard, si un politicien s’avise de proposer l’abolition d’Halloween Québec, il sera accusé de vouloir ramener le Québec en arrière. Des mises à pied au nom d’une vision rétrograde qui nous replongerait dans la noirceur d’autrefois, non merci. Des groupes subventionnés sauraient mettre en relief les dangers de la droite et de ses odieuses réductions des dépenses gouvernementales.
LEÇONS À RETENIR
Ce débat sur l’Halloween est exagéré. On s’entend que fêter une journée ou le lendemain n’est pas si grave, à l’échelle des malheurs du monde. Il contient néanmoins deux enseignements intéressants.
Premièrement, nos enfants vivent dans un monde en ouate. Il y aurait une leçon normale à apprendre que dans la vie, il ne fait pas toujours beau.
Deuxièmement, nous découvrons à quel point l’État, avec tous ses tentacules, s’est introduit en profondeur dans nos vies, toujours sous de nobles prétextes, comme la sécurité.