Pénurie d’étudiants en cannabis
Les cégeps et les universités font des pieds et des mains pour recruter des gens voulant développer le pot
Un an après la légalisation, des programmes d’études en cannabis dans les cégeps et les universités peinent à remplir leurs salles de classe, et parfois même à débuter les cours, faute d’inscriptions suffisantes.
Au cégep de l’Outaouais, un programme de neuf mois en production et transformation de cannabis devait démarrer en octobre dernier.
Mais, avec moins de dix étudiants inscrits, le début des cours a été reporté à novembre… Puis, à décembre.
Pourtant, quand le programme a été présenté au public, l’enthousiasme était palpable, se souvient le porte-parole Simon Desjardins. « On recevait des dizaines et des dizaines de personnes intéressées ».
Les finissants de cette attestation d’études collégiales pourront, par exemple, travailler comme techniciens dans les laboratoires de transformation du cannabis, ou encore à vérifier la qualité des produits.
« C’est sûr qu’on est tous préoccupés », dit Valérie Gosselin du cégep Gérald-Godin, dans l’ouest de Montréal, qui devrait offrir un programme similaire dès le printemps prochain.
STIGMATISATION
À l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR), un nouveau profil en cannabis à l’intérieur du baccalauréat en biochimie a bel et bien vu le jour en septembre, avec seulement 6 étudiants sur les 32 qu’il peut recevoir.
Pour le professeur Hugo Germain, une partie de la défection des étudiants potentiels s’explique notamment par la stigmatisation qui existe encore autour de la marijuana, des parents se montrant réticents quand leurs jeunes disent vouloir étudier le cannabis.
« On a l’impression qu’on a perdu environ la moitié de nos étudiants à cause de ça », dit-il.
À cela vient s’ajouter le fait que le Québec est en plein emploi, ce qui incite les travailleurs à rester sur le marché du travail plutôt que de retourner sur les bancs d’école, indique Francine Bouchard, directrice de la formation continue au cégep de l’Outaouais.
Aussi, certains étudiants intéressés ont « déchanté » quand ils ont réalisé le caractère sérieux du programme, avec des exigences en chimie, physique et biologie, ajoute-t-elle.
EMPLOYEURS IMPATIENTS
L’ironie, c’est que les entreprises de l’industrie du cannabis sont impatientes d’embaucher ces futurs finissants. Les responsables de programme interrogés ont donc bon espoir que les étudiants seront au rendez-vous en temps et lieu.
Le cégep Gérald-Godin misera d’ailleurs sur des cours donnés les soirs et les fins de semaine afin d’attirer les gens qui sont déjà en emploi, explique Valérie Gosselin.
Au cégep de l’Outaouais, les cours devraient finalement débuter en janvier avec une dizaine d’étudiants. « Mais peut-être [qu’en janvier] je vais vous dire : malheureusement, on reporte à l’automne », avoue Mme Bouchard.
De son côté, l’Université McGill avait annoncé, dès 2018, la création d’un certificat en culture de cannabis, qui devait débuter à l’hiver dernier. Le programme sera plutôt offert en juin 2020. L’Université n’a pas répondu à nos questions sur la raison de ce report.