LA COVID-19 DEVIENT LA DEUXIÈME CAUSE DE MORTALITÉ AU QUÉBEC
Deuxième cause de décès au Québec depuis le début de la pandémie, la COVID-19 pourrait emporter davantage de vies que le cancer d’ici la fin de l’année.
Le Journal a dressé au cours des derniers jours le bilan des diverses causes de mortalité chez les Québécois sur cinq années, entre 2012 et 2016.
Il s’agit des données les plus complètes et détaillées détenues par l’Institut de la statistique du Québec.
Avant que n’apparaisse le coronavirus, environ 1200 personnes mouraient chaque semaine au Québec.
Le tiers de ces décès est attribuable aux cancers – la cause principale de mortalité dans la province – qui tuent près de 400 personnes de façon hebdomadaire.
Débarquée en catastrophe en début d’année, la COVID-19 se hisse aujourd’hui en seconde position de ce triste palmarès. Six semaines après le premier décès survenu au Québec, le 18 mars, le coronavirus emportait en moyenne 293,5 morts par semaine. Juste devant les maladies cardiaques, qui fauchent 138 âmes aux sept jours.
Elle est ainsi devenue cinq fois plus mortelle que les maladies cérébrovasculaires (AVC), près de huit fois plus que les pneumopathies et la grippe réunies, 13 fois plus que les suicides.
VERS LA POSITION DE TÊTE ?
La COVID-19 pourrait-elle poursuivre sa funeste ascension et devenir la première cause de décès au Québec d’ici la fin de l’année ?
« Ça pourrait, avance Alan Cohen, professeur à la Faculté de médecine de l’Université de Sherbrooke. C’est facile d’imaginer des scénarios que oui. Mais c’est facile d’imaginer des scénarios que non. »
« Il est sûr qu’actuellement, il va y avoir encore beaucoup de décès. Sur une période courte, vous avez raison : c’est l’une des premières causes de décès. Sur une année, en 2020, ça devient plus compliqué à dire », précise pour sa part Robert Bourbeau, professeur émérite de démographie à l’Université de Montréal.
NOMBREUSES POSSIBILITÉS
Tous les modèles actuels étant basés sur des prévisions, le spectre des possibilités demeure large. Les scénarios sont multiples, comme plusieurs données sont encore inconnues.
Quelles seront les conséquences de la réouverture graduelle des écoles et des commerces sur la propagation du virus ? Qu’adviendra-t-il de la deuxième vague ?
« On peut faire plusieurs hypothèses sur la proportion de personnes infectées et le pourcentage de décès parmi ces genslà, poursuit M. Bourbeau. Si j’ai 20 % de personnes infectées, avec un taux de 1 % de décès, ça me donnerait 17 000 décès. Et 17 000 décès, ça serait quand même moins que les cancers », illustre-t-il.
Dans un scénario plus pessimiste, une recrudescence de la maladie « au mauvais moment », notamment lors de la saison de la grippe, pourrait créer une congestion dans les hôpitaux et jouer à la hausse sur le taux de mortalité, analyse le professeur Cohen.
UN CYCLE
Pour le Dr Martin Champagne, président de l’Association des médecins hématologues et oncologues du Québec, il est peu probable que la COVID-19 surclasse éventuellement les cancers comme cause de décès principale.
« La COVID n’est pas là pour rester éternellement. Le propre de la pandémie, c’est qu’il y a des cycles. Il peut y avoir des pics d’activité qui font qu’il peut y avoir beaucoup de mortalités dans les crises, et après, ça devrait diminuer. Puis, ça peut recommencer », expose-t-il.
Même son de cloche du côté du Dr Paul Poirier, cardiologue à l’Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec.
« Les gens sont frappés par l’imaginaire de la COVID parce que sur une courte période de temps, ça tue beaucoup de monde. Mais sur 365 jours, comparé aux maladies cardiovasculaires, pulmonaires, cancers ? Non. C’est juste que là, c’est intense », tranche-t-il.