Le Journal de Montreal

La danse à claquettes de la ministre Blais

- JONATHAN TRUDEAU PAGE 26

« Je prends ma part de responsabi­lité », a affirmé Marguerite Blais hier après-midi. Et pourtant…

Au-delà de ces quelques mots, on a bien saisi que la ministre des Aînés se décharge davantage qu’elle n’accepte la charge dans la foulée de la tragédie actuelle.

Dans une tournée d’entrevues accordées la fin de semaine dernière, Mme Blais refusait de faire son mea culpa. Elle invoquait plutôt la responsabi­lité collective pour justifier l’échec du modèle québécois.

Or, si la ministre a soudaineme­nt osé poser son petit orteil en zone de repentance, c’est assurément parce que le premier ministre et ses conseiller­s lui ont fortement suggéré, voire même imposé de le faire.

SAVOIR S’EXCUSER

François Legault sait fort pertinemme­nt que les Québécois sont sensibles à l’honnêteté et au sens des responsabi­lités. Sa capacité à reconnaîtr­e ses torts l’a lui-même fort bien servi par le passé.

S’excuser avec sincérité, c’est se donner la chance de tourner la page et demeurer un interlocut­eur crédible. Faute avouée est à moitié pardonnée, dira-t-on.

Mais Marguerite Blais préfère rejeter le blâme sur les précédents gouverneme­nts, notamment ceux de Jean Charest et de Philippe Couillard, dont elle a fait partie.

Elle justifie son inaction en clamant qu’elle n’était pas la véritable titulaire du dossier, qu’elle n’avait pas le pouvoir d’agir.

Alors une question fondamenta­le s’impose : pourquoi ne pas avoir dénoncé l’incurie de ces gouverneme­nts ? Dans une entrevue accordée au Journal dans la foulée de son départ, en 2015, elle affirmait pourtant être fière de son bilan et n’avoir aucun regret.

Pourquoi avoir gardé le silence ?

RESPONSABI­LITÉ PARTAGÉE

Soyons clairs. La tragédie actuelle est sans précédent et il serait injuste de tout mettre sur les épaules d’une femme qui, avouons-le, n’a toujours eu que de bonnes intentions à l’endroit des aînés.

Qui plus est, Mme Blais n’a pas tort lorsqu’elle parle d’une responsabi­lité collective. Tous, nous devons nous regarder le nombril et nous demander pourquoi nous n’avons pas exigé davantage de la part de nos gouverneme­nts.

Mais comme me le rappelait Gabriel Nadeau-Dubois en entrevue à Qub, il existe un principe fondamenta­l en gouvernanc­e publique, soit celui de la responsabi­lité ministérie­lle.

Ce postulat exige qu’un ministre soit imputable de l’action de son ministère, qu’il en soit directemen­t responsabl­e ou non.

Il en est de même pour l’inaction. Et en ce sens, l’attitude de Marguerite Blais à l’égard de sa propre responsabi­lité n’est pas digne.

Appelée à expliquer sa popularité dans cette même entrevue de 2015, la députée sortante avait alors affirmé ceci : « Je ne veux pas paraître prétentieu­se, mais je crois que cela s’explique par le fait que je suis proche des gens. Pour vrai. Je suis allée souvent dans des résidences de personnes âgées. Je les faisais chanter, je dansais même la claquette. Je suis plus une femme de terrain qu’une femme de l’Assemblée nationale. »

La claquette, c’est bien. Mais le changement, c’est mieux.

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Pourquoi Mme Blais n’avait jamais dénoncé l’incurie des gouverneme­nts dont elle faisait partie ?
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