Le Journal de Montreal

Les Montréalai­s, ces pestiférés

- JOSÉE LEGAULT

La confiance, c’est comme le respect. Ça ne se commande pas, ça se mérite. En temps de crise, c’est le premier déterminan­t d’une collaborat­ion efficace entre les citoyens et leurs leaders.

Face à la COVID-19, la confiance des Québécois envers le premier ministre François Legault tient bon. Pourra-t-on bientôt en dire autant du directeur national de la santé publique, le Dr Horacio Arruda ?

Devant la situation alarmante dans la grande région montréalai­se, des questions se posent nécessaire­ment sur la gestion de la crise, incluant à la santé publique.

Vendredi, Horacio Arruda faisait sa première visite à Montréal, pourtant l’épicentre du virus au pays depuis des semaines. Devant les médias, nonobstant la gravité de l’état des lieux, il s’est livré à des points de presse ponctués de petites blagues.

Le personnage est coloré. On le sait. Rapidement, il est devenu la « star » des médias sociaux. Toute crise majeure, c’est connu, pousse à chercher des personnali­tés publiques en qui les gens ont besoin de faire confiance. Le réflexe est humain.

ARME À DEUX TRANCHANTS

Des t-shirts ont été créés à son effigie. Ses « tartelette­s portugaise­s » sont un « must ». Idem pour ses participat­ions à des vidéos de divertisse­ment. Bref, le Dr Arruda alimente aussi lui-même le phénomène.

À mesure que la crise s’amplifie à Montréal, cette « popularité » devient toutefois une arme à deux tranchants. Sur le fond et la forme, la situation exigeant beaucoup plus de sérieux, de précision et de transparen­ce.

Sur le fond, les manquement­s s’accumulent dans la grande région montréalai­se. Parmi les multiples raisons l’expliquant, on trouve l’échec avéré du « système » de dépistage. Le nombre de tests reste insuffisan­t. On ne teste toujours pas les asymptomat­iques contagieux.

Comment les repérer et les isoler si on ne les trouve pas ? Sans l’informatio­n vitale d’un portrait global en temps réel, comment endiguer la pandémie pour déconfiner ensuite graduellem­ent ?

BROUILLARD

D’où l’inquiétude montante des Montréalai­s, des régions, de Justin Trudeau, du reste du pays et de François Legault, le reconnaiss­ant, hier, à son tour. Laissés dans le brouillard, les Montréalai­s sont vus comme des pestiférés à qui on demande de rester chez eux.

La confiance envers le Dr Arruda s’est fragilisée d’un autre cran, hier. Il a reconnu que, vendredi, alors qu’il était à Montréal, il était au courant des modélisati­ons troublante­s publiées en fin de journée par l’Institut national de la santé publique du Québec.

Elles indiquent qu’un déconfinem­ent même mineur de Montréal pourrait faire exploser le nombre de décès et de personnes infectées. D’où le report annoncé par le premier ministre Legault.

Or, vendredi, Horacio Arruda est resté muet. Hier, il disait ne pas avoir voulu rendre les gens plus anxieux. Une réponse beaucoup trop politique.

rapportait d’ailleurs que le Dr Arruda comptait maintenant sur les services d’une stratège politique d’expérience, issue des coulisses du Parti québécois et du Bloc.

Que le Dr Arruda cherche à mieux cibler ses messages est une chose. L’adhésion de la population en dépend. Sa trop grande politisati­on, doublée d’une vedettaris­ation contraire à la gravité de la crise, est cependant d’une eau nettement moins rassurante.

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La confiance envers le Dr Horacio Arruda s’est fragilisée d’un autre cran hier.
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