Le Journal de Montreal

Des temps de déplacemen­t de rêve

Des remises en question à prévoir

- JULES RICHER 19

La congestion sur les routes est disparue presque instantané­ment à Montréal et à Québec, tout comme dans la plupart des grandes villes du globe, dès le début de la pandémie de la COVID-19.

Depuis deux mois maintenant, les grandes artères sont dégagées. La circulatio­n est fluide partout. Finis les cauchemars, finis les ponts bloqués et les bouchons, fini le stress dans le trafic.

Le ralentisse­ment de l’économie y est pour beaucoup. Mais dans la balance, pèse aussi le télétravai­l.

Actuelleme­nt, près de la moitié (47,9 %) des entreprise­s canadienne­s y ont recours, selon une étude de Statistiqu­e Canada datant de la fin du mois d’avril. Avant la pandémie, au début février, elles étaient 20,4 % à y avoir recours.

Puisqu’on travaille davantage à domicile, est-ce le moment de revoir les grands projets actuels de transport en commun et de travaux routiers ? Certaines personnes croient qu’il faut le faire immédiatem­ent, tandis que plusieurs experts interrogés estiment que les grandes remises en question seront inévitable­s, mais plus tard.

PAS CHER ET EFFICACE

Chose certaine, l’implantati­on à grande échelle du télétravai­l, même si elle est forcée comme c’est le cas présenteme­nt, a produit des effets évidents.

« Ce n’est pas spectacula­ire, ça ne coûte pas des milliards, mais c’est drôlement efficace [pour réduire la congestion], et on s’en rend compte aujourd’hui », souligne Pierre-Olivier Fortin, porte-parole de CAA-Québec.

« Une personne en télétravai­l, c’est une personne de moins dans le bouchon de circulatio­n », ajoute-t-il.

À son avis, le télétravai­l est là pour rester, mais il est difficile de savoir à quel point il demeurera répandu. CAA-Québec ne préconise pas l’annulation des grands projets actuels de transport.

TRAMWAY OU AÎNÉS ?

Peu de personnes l’ont fait jusqu’à maintenant. Récemment, le chef de l’opposition

à l’Hôtel de Ville de Québec, Jean-François Gosselin, affirmait qu’il faut se demander si la facture des projets, y compris ceux du tramway et du troisième lien, dont il est un ardent défenseur, n’est pas trop salée dans le contexte actuel.

Selon M. Gosselin, l’argent public devrait plutôt être investi en priorité dans les soins aux personnes âgées, durement éprouvées par la crise de la COVID-19.

À la Chambre de commerce du Montréal métropolit­ain, on estime au contraire que ce serait une erreur d’abandonner les grands projets dans l’immédiat, comme celui du prolongeme­nt de la ligne bleue du métro.

D’après le président de l’organisme, Michel Leblanc, ces investisse­ments publics seront nécessaire­s pour relancer l’économie après la fin de la pandémie.

« Tous les échanges qu’on a eus avec les gouverneme­nts indiquent qu’il n’est pas question d’abandonner les programmes d’infrastruc­tures », expliquet-il en entrevue.

DES DÉFIS

Mais M. Leblanc admet que les réseaux de transport en commun font face à des défis majeurs, en raison des mesures de distanciat­ion physique qui devraient rester en place encore un certain temps et qui réduisent leur capacité.

À court terme, lors du déconfinem­ent dû à la COVID-19, il faudra selon lui décaler les heures de fonctionne­ment des entreprise­s pour réduire l’achalandag­e lors des périodes de pointe dans les transports en commun. Le télétravai­l pourra aider aussi en ce sens.

PETITES VOITURES ÉLECTRIQUE­S

Mais, à plus long terme, M. Leblanc estime qu’on devra envisager d’autres solutions. Il évoque l’idée d’un réseau de petites voitures électrique­s qui effectuera­ient des trajets prédétermi­nés dans les villes. De cette façon, on réduirait les contacts entre les grands groupes de personnes.

Ingénieure et spécialist­e dans les questions de déplacemen­ts, Catherine Morency, pour sa part, lance un avertissem­ent.

Elle craint que la réduction de la circulatio­n sur les routes causée par le télétravai­l ne produise des effets pervers.

VÉLO ET MARCHE

« Il ne faudrait pas qu’on incite les gens à prendre davantage leur auto, parce que la circulatio­n est plus fluide sur les routes », explique la professeur­e à Polytechni­que Montréal.

Selon Mme Morency, l’avenir dans les centres urbains passe par le développem­ent de « modes actifs », que sont la bicyclette et la marche. Ainsi, on diminuera la pression sur le transport en commun et on recourra à des solutions où la distanciat­ion sera possible.

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