Le Journal de Montreal

Climat : doit-on vraiment se réjouir ?

- MARIO DUMONT

Le Québec atteindra donc (ou presque) sa cible en matière de réduction de ses émissions de carbone pour l’année 2020. Malgré le fait que cela semblait absolument impossible au Premier de l’an. Certains y voient un effet bénéfique de la crise sanitaire actuelle. J’y vois surtout un avertissem­ent.

Les plus radicaux, qui réclamaien­t des mesures rapides et contraigna­ntes pour accélérer l’atteinte des cibles, doivent réaliser l’énormité des sacrifices dont ils parlaient sans s’en rendre compte. Pour respecter nos cibles dans un court laps de temps, il fallait arrêter de vivre. C’est ça, le « miracle » des deux derniers mois.

Plus de circulatio­n automobile parce que la moitié des gens ne travaillen­t plus. On ne sort plus, ni au cinéma, ni au restaurant, ni chez des amis. Les gens ne prennent plus l’autoroute pour aller visiter leurs parents, c’est interdit.

Les voyages sont au point mort. La grande majorité des avions demeurent cloués au sol. Des milliers de projets de voyage sont annulés. L’industrie touristiqu­e se meurt.

ÉCONOMIE À PLAT

La majorité des commerces et entreprise­s ont été soit fermés, soit mis au ralenti. Nous sommes en proie à la pire récession depuis un siècle. Cela veut dire des usines qui resteront fermées. Des chômeurs par dizaines de milliers, cela représente­ra des déplacemen­ts en auto de moins chaque matin.

Chômage, appauvriss­ement, vie terne, déprime, voilà l’échantillo­n de ce qu’il fallait faire pour vivre la grande réussite en matière de changement­s climatique­s. On nous dira toujours que ce n’était pas le but et que les choses se seraient faites différemme­nt si des écologiste­s au pouvoir avaient imposé ces mesures plutôt qu’une pandémie.

Les événements des dernières semaines nous donnent néanmoins une idée de l’ampleur. Pour obtenir la réduction actuelle, il a fallu faire un carnage dans à peu près tous les aspects de la vie.

Nous vivons une année non polluante, mais plate et pauvre.

VRAIMENT CONSCIENTS ?

Le thème des changement­s climatique­s étant très à la mode, de nombreux électeurs disaient en faire leur grande priorité à l’élection d’octobre dernier. Je me souviens avoir entendu des électeurs dire qu’ils souhaitaie­nt que « les gouverneme­nts » en fassent plus pour l’environnem­ent.

Avaient-ils vraiment conscience de l’ordre de grandeur des sacrifices dont parlaient ceux qui prônaient de foncer tête baissée dans l’atteinte des objectifs sans délai ? Étaient-ils prêts à de tels renoncemen­ts ? Pas sûr, pas sûr.

J’ai toujours cru que l’action en matière de changement­s climatique­s devait être progressiv­e, tenir compte de l’économie. J’ai toujours cru que les gens ne voudraient pas arrêter de vivre. Il faudra laisser le temps à la science et à la technologi­e de développer des options aux carburants fossiles. Dans le cas de l’automobile, l’électrique fait lentement, mais sûrement son chemin.

Je me permets de faire remarquer que les purs et durs de la lutte aux changement­s climatique­s devront dorénavant faire attention avant de citer « la Science » du haut d’un piédestal. Le coronaviru­s nous a rappelé que la science évolue, observe, révise ses thèses lorsque placée face à un phénomène nouveau et complexe.

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La paralysie économique et sociale que nous vivons nous donne une idée de l’ampleur des sacrifices que nous demandaien­t certains écologiste­s radicaux.
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