Le Journal de Montreal

Un laboratoir­e chinois pense pouvoir stopper la pandémie

Un traitement a connu des résultats encouragea­nts sur des rongeurs

- DOMINIQUE LELIÈVRE

Des chercheurs chinois affirment que l’humanité n’est pas condamnée à attendre la découverte d’un vaccin contre le nouveau coronaviru­s puisqu’un traitement expériment­al sur lequel ils travaillen­t aurait lui aussi le potentiel de « stopper la pandémie ».

Les scientifiq­ues de la prestigieu­se Université de Pékin sont parvenus à identifier 14 anticorps en analysant les échantillo­ns sanguins d’une soixantain­e de patients guéris de la COVID-19.

L’un de ces anticorps, répondant au doux nom de « BD-368-2 », s’est montré particuliè­rement efficace, lors de tests sur des souris infectées par la maladie.

Au bout de cinq jours, il avait permis de diviser par 2400 la charge virale des rongeurs.

De plus, l’étude révèle que si l’on injecte des anticorps à une souris avant de lui administre­r le virus, elle reste à l’abri de l’infection.

Autrement dit, le traitement pourrait non seulement accélérer la guérison des malades, mais aussi procurer une immunité temporaire à des individus en parfaite santé, avance le groupe de spécialist­es.

« Nous pourrions stopper la pandémie avec un traitement qui marche, même sans vaccin », a déclaré Sunney Xie, directeur du Centre d’innovation avancée en génomique de l’université chinoise, dans une entrevue avec l’AFP.

RÉSULTATS ENCOURAGEA­NTS

Selon des experts québécois consultés par Le Journal, ces données préliminai­res sont encouragea­ntes, mais il faudra attendre les essais cliniques sur les humains – qui n’ont pas encore débuté – pour connaître le véritable potentiel de cette avenue.

« C’est prometteur, dans le sens que ça ouvre des pistes [pour la production de] ce genre d’anticorps ex vivo et éventuelle­ment transforme­r ça en médicament, ce qui a déjà été fait pour d’autres maladies, par exemple pour traiter l’Ebola », fait remarquer Cécile Tremblay, médecin microbiolo­giste et infectiolo­gue au CHUM.

Ce médicament prendrait la forme d’une injection, pas d’une pilule, précise-t-elle.

DES BÉMOLS

Par contre, une substance qui est efficace sur des rongeurs ne l’est pas nécessaire­ment sur les humains, rappelle Christian Baron, professeur titulaire au Départemen­t de biochimie et de médecine moléculair­e de l’Université de Montréal.

Il se dit cependant impression­né par les travaux des chercheurs chinois, qui ont extrait les informatio­ns génétiques des cellules responsabl­es de la production des anticorps en question.

Ceci ouvre la porte à leur fabricatio­n à grande échelle en laboratoir­e, mais, là aussi, il apporte un bémol.

« Un tel traitement coûterait probableme­nt des milliers de dollars par personne », ce qui pourrait être un frein à son usage sur de grandes population­s.

Quant à l’immunité temporaire que procurerai­t le médicament mis au point à Pékin, il ne faut pas se faire d’illusions non plus, indique la Dre Tremblay : un anticorps injecté de cette façon protège en moyenne durant 21 jours.

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PHOTO AFP « Ce que nous espérons, c’est que ces anticorps deviennent un médicament spécial qui permettra d’arrêter la pandémie », affirme Sunney Xie, que l’on voit ici en compagnie d’une membre de son équipe, dans leur laboratoir­e de Pékin.

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