Condamnés à réussir
Hemingway disait qu’une opinion, c’est comme un trou de cul.
Tout le monde en a un, et chacun pense que c’est celui des autres qui pue.
Il n’y a rien de plus facile que d’avoir une opinion, et chacun est persuadé d’avoir raison, parfois même après qu’on lui a démontré qu’il avait tort.
Vous ferez donc ce que vous voulez de mon opinion.
S’IL FALLAIT
Le Québec s’engage dans la voie du déconfinement. D’accord.
Il n’y a pas un mode d’emploi unique, comme le montre la diversité des approches à travers le monde.
On s’entend cependant sur une chose : pour déconfiner, il faut avoir des capacités de dépistage massives pour identifier rapidement la personne infectée, puis tous ceux qu’elle a croisés.
Avons-nous cela ?
S’il y a un constat qui émerge, c’est le décalage entre les annonces et la réalité sur le terrain.
On a vu à l’usine Cargill, dans une garderie à Mascouche, ailleurs aussi, à quel point la transmission peut être foudroyante dans les milieux de travail.
En France, des plages ont dû être refermées sitôt ouvertes pour non-respect des consignes de sécurité.
François Legault a dit que si le nombre de cas repartait à la hausse, il n’hésiterait pas à revenir en arrière.
Imaginez cependant l’impact psychologique dévastateur d’un retour à un confinement généralisé.
La désobéissance civile se répandrait sans doute comme une traînée de poudre.
Comme le gouvernement sait cela, le retour en arrière, s’il devait être rétabli, serait aussi localisé, aussi limité que possible.
En langage clair, cela signifie que lorsque vous déconfinez, vous êtes condamné à réussir… puisque le retour en arrière est difficile, voire impossible à envisager.
Quand le vin est tiré… Prenons les rassemblements permis dès vendredi et voyons si j’ai compris.
Dix personnes au maximum, pas plus de trois familles, dehors seulement, sauf pour le pipi, à condition de garder les deux mètres de distance… mais dont aucune autorité ne pourra, si on a deux sous de réalisme, vérifier le respect, sauf en cas de dénonciation par un voisin, quand ce sera sans doute trop tard.
Il est facile d’ironiser, mais cela illustre, presque par l’absurde, que la réussite du déconfinement, c’est notre responsabilité autant que celle du gouvernement.
Je ne sais pas vous, mais moi, ces jours-ci, à l’épicerie, dans les parcs, dans les rues, sur le perron des portes, je vois un évident relâchement.
Les masques restent rares. Chaque tricherie trouve sa justification, sourire en coin.
Le retour du beau temps et l’exaspération y sont pour beaucoup.
Après avoir cassé bien du sucre sur le dos du gouvernement, c’est maintenant à chacun d’entre nous de continuer à penser aux autres.
CIVISME
Pour certains, c’est tout ou rien. On passe du tout était interdit à tout est redevenu comme avant.
On ne leur demande pourtant pas d’aller faire du bénévolat dans un CHSLD, juste de faire attention.
La notion d’une réouverture graduelle, mesurée, prudente, étapiste leur passe mille pieds par-dessus la tête.
Pour eux, ce fut un mauvais moment à passer, et il est passé.
Après avoir cassé bien du sucre sur le dos du gouvernement, c’est maintenant à chacun d’entre nous de continuer à penser aux autres.
Est-ce trop demander ?