Le Journal de Montreal

Me Guy Gagnon,

91 ans, Montréal

- – Claudia Berthiaume

Une grande force tranquille s’est éteinte le 1er mai dernier, victime de la COVID-19.

Homme de théâtre, baryton à la voix puissante, juriste réputé, Me Guy Gagnon a excellé dans tout ce qu’il a accompli.

Né dans l’entre-deux-guerres, il a suivi des études classiques au collège Saint-Laurent, où il a découvert le théâtre.

C’est toutefois en droit qu’il a poursuivi ses études, à l’Université de Montréal.

En marge de son baccalauré­at, Guy Gagnon a fait partie du quintette a cappella Les Gamins de la gamme, formé de quatre autres étudiants.

« Charles Aznavour a même fait la première partie d’un de leurs spectacles, c’est dire à quel point ils étaient populaires à l’époque », raconte sa conjointe des 20 dernières années, Luce Moreau.

Cette passion pour la musique, il l’a transmise à ses cinq fils, souligne-t-elle fièrement.

Dans les années 1950, le comédien a obtenu un rôle-titre dans la série télévisée Cap-aux-sorciers.

Il était alors connu sous le nom d’emprunt de Pierre Belzil, car il réservait l’usage de son nom de baptême pour sa pratique du droit.

Spécialisé dans le droit commercial, Me Gagnon a défendu plusieurs patrons lors de négociatio­ns musclées dans les années 1960-1970, se forgeant un nom et une réputation de grand plaideur dans le milieu juridique.

« C’était quelqu’un d’un grand calme. Il a laissé une marque indélébile chez les gens. À son décès, j’ai reçu beaucoup de témoignage­s de gens qui me disaient : “Si Me Gagnon n’avait pas été là, je n’aurais pas eu la carrière que j’ai eue” », relate Mme Moreau.

Celle qui a oeuvré au sein de l’Orchestre métropolit­ain a rencontré l’aîné dans un camp musical des Laurentide­s au tournant des années 2000.

« Quand je l’ai entendu chanter, ça a été un coup de foudre. Je me suis dit : “Il faut que je revoie cet homme-là” », décrit-elle.

Mme Moreau estime avoir vécu la plus belle étape de sa vie aux côtés de ce grand sage.

« Au début, j’étais fâchée contre la maladie d’Alzheimer de nous voler du temps. Finalement, ça nous a donné l’occasion de vivre dans le moment présent. C’est le plus bel héritage qu’il me reste », résume-t-elle.

« À la fin, il ne savait pas mon nom, mais quand j’arrivais, il voulait toujours m’embrasser. Je lui demandais : “Est-ce que tu m’aimes un petit peu encore ?” et il répondait “Oui, un petit peu… mais non beaucoup” », termine sa conjointe.

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PHOTO COURTOISIE Luce Moreau regarde tendrement son conjoint des 20 dernières années, Guy Gagnon.

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