Beyrouth : loin des yeux, près du coeur
Nous étions le 12 janvier 2010 à 16 heures 53 minutes. Un tremblement de terre dévastateur venait de frapper le pays d’origine de mes parents, Haïti.
Je me souviens de cette journée, car elle s’est terminée tard dans la nuit. Pour me renseigner, je consultais toutes les chaînes d’information continue au Québec et ailleurs dans le monde.
Je me promenais de manière obsessive sur internet.
Je ne voulais pas quitter mes écrans par peur de manquer un renseignement important, quitte à ne plus manger. Je voulais comprendre ce qui s’était passé, connaître l’état de la situation, savoir si des membres de ma famille étaient touchés, garder contact avec mon père et ma mère afin de les informer des développements et, surtout, que l’on me dise quoi faire pour aider.
Je me sentais vide, comme si je venais de perdre tous les gens que je connaissais et avec qui j’avais tissé des liens profonds. Et c’était exactement le cas ; je ne l’avais juste pas compris à ce moment.
LE SENTIMENT D’IMPUISSANCE DE LA DIASPORA
Des milliers de Québécois d’origine libanaise vivent ces mêmes émotions difficiles à expliquer. C’est un mélange de tristesse, de colère, d’inquiétude, mais également une prise de conscience que le Liban a besoin d’eux, maintenant.
Le pays était déjà dans une situation économique précaire, mais cet événement terrible arrive au même moment qu’une pandémie mondiale.
Cette situation crée une pression additionnelle sur les équipes soignantes déployées sur le terrain et sur les protocoles à mettre en place pour venir en aide aux personnes touchées.
Au cours des dernières heures, j’ai pu m’entretenir avec quelques amis d’origine libanaise qui résident au Québec, et une phrase m’a marqué :
« La seule chose que je voudrais faire en ce moment serait de monter dans un avion et me rendre là-bas pour prêter main-forte. Mais avec la pandémie, je suis cloué ici. »
LE QUÉBEC ET LE CANADA DOIVENT AGIR
Au-delà de la mise en berne du drapeau du Québec sur la tour de l’Assemblée nationale, le gouvernement québécois se doit de poser des gestes concrets pour venir en aide à ce pays ami. La population québécoise d’origine libanaise se compte par milliers et ce pays a le statut d’État, tout comme le Québec, à l’Organisation internationale de la Francophonie.
Le Canada doit également contribuer à l’effort, car la solidarité entre les États francophones se mesure notamment par notre souci d’aider nos alliés dans le besoin.
Dès mardi, le président français Emmanuel Macron annonçait le déploiement d’un détachement de la sécurité civile, la transmission de plusieurs tonnes de matériel sanitaire et l’arrivée de médecins d’urgence pour soutenir le milieu hospitalier.
La réponse des autorités canadiennes doit être à la mesure des circonstances, quelles que soient les solutions envisagées.
Comme l’écrivait le poète Khalil Gibran : « La terre est ma patrie et l’humanité, ma famille ». Chers amis libanais, mes pensées vous accompagnent dans ces moments douloureux.