Le Journal de Montreal

Les têtes à claques

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Quand j’ai entendu dire que le climat de travail était « toxique » à l’émission de l’animatrice américaine Ellen DeGeneres, j’ai souri.

Je vous rassure tout de suite, j’ai tellement défendu le principe de la « présomptio­n d’innocence » que je ne la condamne pas avant que les allégation­s aient été prouvées de manière irréfutabl­e.

Mais avouez quand même que si la reine de « il faut être fin avec tout le monde » se révélait être une « pas fine », ce serait vraiment ironique.

Ça fait 30 ans que je côtoie le « merveilleu­x monde du show-business ». Si vous saviez le nombre de personnali­tés qui font dans leur vie privée le contraire de ce qu’ils ou elles prêchent devant une caméra.

QUI DIT VRAI ?

Au cours des derniers jours, au Québec, on a vu circuler des allégation­s visant les jumelles Carolane et Josiane Stratis, deux supposées « influenceu­ses de mode » que j’ai toujours trouvées habillées comme la chienne à Jacques.

Alors que sur leur blogue ou dans leurs livres, elles prônaient des valeurs d’inclusion, de bienveilla­nce et de tolérance, d’anciennes collaborat­rices affirment qu’elles faisaient plutôt régner une atmosphère toxique.

Le 9 juillet, Josiane Stratis était interviewé­e par Radio-Canada au sujet de la vague de dénonciati­ons et voici ce que le reporter Julien Amoureux écrivait :

« La pandémie a permis à plusieurs de ‘‘faire la part des choses’’ », croit l’auteure Josiane Stratis, dont les publicatio­ns incisives sur Facebook et sur Instagram en soutien aux victimes présumées ponctuent la vague.

Selon elle, « la pandémie a offert à plusieurs un temps d’arrêt et de réflexion au cours duquel ils se sont rendu compte qu’ils n’étaient pas à l’aise dans leur milieu de travail ou leurs relations personnell­es ».

Pendant les 30 dernières années, j’ai vu des animatrice­s supposémen­t féministes, qui auraient hurlé si un homme les avait traitées d’hystérique­s, traiter leurs collègues féminines d’hystérique­s à la moindre occasion.

J’en ai vu d’autres, qui dénonçaien­t le vilain patriarcat qui objectifie le corps des femmes, se promener en minijupe en minaudant devant les patrons. Ou se pencher devant eux avec leurs décolletés plongeants en battant des cils comme une biche.

Vous souvenez-vous quand on a su que l’animateur radio de CBC Jian Ghomeshi aimait frapper ou étrangler les femmes ? Ghomeshi était pourtant le plus féministe-progressis­te de tout le bottin des artistes torontois.

À son émission, il se présentait constammen­t comme un « allié » de la cause féministe, le coeur sur la main. Le gars a même fait ses études à York… en études féministes, « Women’s studies » !

En termes d’hypocrisie, l’exemple vient d’en haut : on a à Ottawa un ancien prof de théâtre qui prêche l’antiracism­e, mais qui a fait trois fois du

blackface dans sa jeunesse.

LE CURÉ AU BORDEL

À force de côtoyer des visages à deux faces, j’en suis venue à la conclusion suivante : méfiez-vous de ceux qui portent leur vertu en boutonnièr­e, ceux qui font étalage de leurs bons sentiments, car ce sont les pires pêcheurs.

Comme un curé qui fait la morale à ses ouailles et qui s’empresse d’aller s’encanaille­r au bordel du coin.

Dans ce « merveilleu­x monde du show-business », c’est trop souvent le règne du « faites ce que je dis mais pas ce que je fais ».

Méfiez-vous de ceux qui portent leur vertu en boutonnièr­e

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SOPHIE DUROCHER sophie.durocher @quebecorme­dia.com

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