Le Journal de Montreal

Un nouveau type de régime de retraite pour les travailleu­rs

- Daniel Germain daniel.germain@quebecorme­dia.com

Le ministre des Finances, Eric Girard, a déposé la semaine dernière un projet de loi qui permettra l’implantati­on d’un nouveau type de régime de retraite en entreprise : le régime à prestation­s cibles (PC).

De quoi s’agit-il ?

Et est-ce une bonne affaire ?

LE RÉGIME PC, LA TROISIÈME VOIE

Il s’agit d’une approche qui s’inscrit entre deux formules déjà connues :

1 Le régime de retraite à prestation­s déterminée­s (PD) : c’est le fonds de pension dont tout le monde rêve. Il garantit au travailleu­r le versement d’une rente de retraite jusqu’au décès, une prestation établie en fonction du salaire et des années de service. Le fonds est alimenté par les cotisation­s des employés et de l’employeur, mais c’est sur ce dernier que repose la responsabi­lité de combler d’éventuels déficits, donc d’assumer les risques financiers.

2 Le régime à cotisation déterminée (CD) : beaucoup moins risqué pour les entreprise­s, ce régime est aussi beaucoup moins généreux pour les employés. Il ressemble davantage à un Régime enregistré d’épargne retraite (REER) individuel auquel l’employeur et l’employé contribuen­t. Quand ce dernier quitte l’entreprise, il part avec sa cagnotte et doit la gérer. C’est sur le bénéficiai­re, individuel­lement, que pèse le risque. Son bas de laine peut s’épuiser.

UNE RENTE À VIE NON GARANTIE

Le régime de retraite à prestation­s cibles emprunte des caractéris­tiques à ces deux régimes.

Comme le PD, il procure au retraité une protection contre le risque de longévité en versant une rente jusqu’au décès, mais la prestation peut diminuer en cas de baisse importante des marchés. L’employeur cotise à la caisse, mais n’a pas à la renflouer à l’apparition d’un déficit.

Les bénéficiai­res assument les risques de façon mutuelle. L’argent laissé sur la table par les participan­ts qui décèdent jeunes sert à financer la retraite de ceux qui vivent vieux.

UN RÉGIME COMPLEXE

« Avec un régime à prestation­s cibles, il faut mettre en place un comité de retraite, établir une politique de placement, réaliser des évaluation­s actuariell­es, etc. Les exigences sont aussi élevées qu’avec un régime à prestation­s déterminée­s », explique Mélanie Beauvais, actuaire et fiscaliste chez Banque Nationale Gestion Privée 1859.

Comme il n’y a pas d’employeur pour combler d’éventuels déficits actuariels, la gestion d’un tel régime de retraite pourrait être plus prudente, selon la spécialist­e. Cela se traduirait par des rentes moins élevées que ce que les participan­ts auraient obtenu, à cotisation­s équivalent­es, avec un régime à prestation­s déterminée­s.

LA NOUVELLE NORME ?

Exception faite de la fonction publique et des très grandes entreprise­s, les régimes de retraite à prestation­s déterminée­s tendent à disparaîtr­e tranquille­ment au profit des régimes à cotisation déterminée, moins dispendieu­x pour les employeurs.

L’arrivée des régimes à prestation­s cibles pourrait bien accélérer ce mouvement. Des entreprise­s qui offrent encore un régime PD seront certaineme­nt tentées de rétrograde­r vers cette formule moins risquée.

De l’autre côté, les organisati­ons qui sont déjà passées au régime CD ne se précipiter­ont pas pour proposer un régime amélioré à prestation­s cibles, plus complexe à gérer.

Ce sera aux employés de le revendique­r, et fort.

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