Le Journal de Montreal

Encore une poursuite liée à l’UPAC

Deux anciens policiers visés par la chasse aux sources journalist­iques réclament 2,65 M$ à l’État québécois

- JEAN-LOUIS FORTIN ET FÉLIX SÉGUIN jean-louis.fortin@quebecorme­dia.com felix.seguin@tva.ca

Les poursuites s’accumulent contre l’État québécois en lien avec les agissement­s allégués d’anciens dirigeants de l’Unité permanente anticorrup­tion. C’est maintenant au tour de deux policiers visés par l’enquête sur les fuites médiatique­s de lancer une poursuite de 2,65 millions $.

Dans des requêtes déposées en Cour supérieure, Richard Despatie, Stéphane Bonhomme et leurs conjointes respective­s se vident le coeur sur le traitement dont ils disent avoir été victimes.

Ils affirment avoir fait les frais de « congédieme­nt illégal », de perquisiti­ons abusives à leurs domiciles et de « fausses dénonciati­ons et allégation­s ».

Les deux policiers de carrière dénoncent « une inconduite étatique qui mine le système de justice québécois ainsi que la crédibilit­é de la population québécoise à l’égard des institutio­ns et de l’administra­tion publique ».

C’est la troisième poursuite contre l’État québécois depuis le début de cette saga, et d’autres risquent de s’ajouter dans les prochains mois (voir ci-dessus).

« THÉORIE DU COMPLOT »

MM. Despatie et Bonhomme ont été visés par la fameuse enquête Projet A initiée sous l’ordre de l’ex-grand patron de l’Unité permanente anticorrup­tion (UPAC) Robert Lafrenière pour trouver qui avait fourni à des journalist­es plusieurs informatio­ns confidenti­elles.

Leurs domiciles ont notamment été perquisiti­onnés et du matériel informatiq­ue leur a été saisi, sur la base de « suppositio­ns », d’« hypothèses » et d’« intentions frivoles », allèguent-ils.

Selon eux, l’ancienne direction de l’UPAC a échafaudé une « théorie du complot » pour rouler dans la farine l’appareil de justice.

Par exemple, pour obtenir un mandat de perquisiti­on à la résidence de M. Despatie, le sergent-enquêteur Jean-Frédérick Gagnon a affirmé à un juge dans des affidavits assermenté­s que Richard Despatie aurait transféré 12 courriels à son adresse personnell­e à partir de sa boîte de courriels de l’UPAC. Or, selon M. Despatie, la grande majorité de ces courriels concernaie­nt… un pool de football.

Ou encore, M. Bonhomme se plaint d’avoir été présenté au juge comme ayant participé au coulage d’informatio­ns même s’il est un « néophyte en informatiq­ue ».

« L’affiant avait pourtant pertinemme­nt connaissan­ce du fait que [M. Bonhomme] savait à peine utiliser un ordinateur et que c’est lui-même qui avait installé internet à la résidence de ce dernier », soutient-il.

« L’UPAC a induit volontaire­ment un juge de la Cour du Québec en erreur afin de soutirer de ce magistrat un mandat de perquisiti­on complèteme­nt abusif basé sur des motifs erronés », écrit notamment Me Daniel Rochefort, le procureur des deux policiers.

AUCUNE ACCUSATION

C’est aussi au cours de l’enquête Projet A que le député et ex-policier Guy Ouellette a été arrêté à l’automne 2017. Ni le député ni les deux policiers qui poursuiven­t aujourd’hui l’État québécois n’ont finalement été accusés de quoi que ce soit.

Richard Despatie, congédié de l’UPAC le 19 octobre 2016, estime que les événements des derniers mois n’ont entraîné rien de moins que « l’anéantisse­ment de [sa] carrière profession­nelle », lui qui présentait pourtant « d’impeccable­s états de service ». Il réclame la somme de 1,35 M$.

Stéphane Bonhomme, suspendu avec solde depuis le 26 octobre 2017, allègue quant à lui des « stratagème­s machiavéli­ques et honteux qui ont été orchestrés par les hautes instances de l’UPAC ». Il demande 900 000 $.

Les deux conjointes des policiers réclament chacune 200 000 $ pour des préjudices psychologi­ques et moraux allégués, ce qui porte le total à 2,65 M$.

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PHOTO D’ARCHIVES, SIMON CLARK Dans sa poursuite, Richard Despatie allègue que l’ancien patron de l’UPAC Robert Lafrenière (sur la photo) livrait une « guerre ouverte » contre le député Guy Ouellette.

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