Le Journal de Montreal

Le virage nationalis­te de Dominique Anglade

Depuis une semaine, Dominique Anglade a décidé d’engager le Parti libéral du Québec dans un virage politique.

- MATHIEU BOCK-CÔTÉ Blogueur au Journal Sociologue, auteur et chroniqueu­r https://plq.org/fr/blogue/lettre-ouverteang­lade-referendum-1995/ mathieu.bock-cote@quebecorme­dia.com @mbockcote

On l’a d’abord vu lorsqu’elle a pris position contre le politiquem­ent correct. C’était bien joué et pas cher payé pour se reconnecte­r un peu avec les Québécois francophon­es, qui en ont marre de la police de la pensée venue des États-Unis.

Elle s’est contentée de rappeler que nous avons le droit, dans une société libre, de prononcer le titre d’un livre sans que des fanatiques en culottes courtes décrètent une fatwa woke. Hélas, ces intimidate­urs compulsifs ont le pouvoir académique et médiatique aujourd’hui.

Contrairem­ent à ce qu’on nous a répété, ce n’était pas une question délicate ni complexe. Défier le politiquem­ent correct exige simplement un peu de courage.

PLQ

Avant-hier, Dominique Anglade a poursuivi son virage, en ajoutant à son arc la corde du nationalis­me, dans le cadre des commémorat­ions du référendum de 1995.

Dans un texte étonnant, elle rappelle non seulement que l’indépendan­ce est une option légitime pour le Québec, mais que ce dernier est encore aujourd’hui mal intégré dans le Canada, qui même d’un point de vue fédéralist­e, demeure insatisfai­sant.

Elle plaide aussi pour certaines mesures linguistiq­ues et le rapatrieme­nt de certains pouvoirs.

Ce nationalis­me est minimal, certes. Mais il rompt assurément avec l’antination­alisme borné des années Couillard.

Sous Philippe Couillard, le PLQ avait troqué ce qui pouvait lui rester de fidélité au Québec pour une soumission absolue au fédéralism­e multicultu­raliste canadien. On sentait chez lui un mépris pour son peuple.

Le virage angladien, à court terme, était nécessaire pour que le PLQ puisse se désenclave­r de sa forteresse montréalol­avalloise.

Il doit parler aux Québécois francophon­es pour espérer regagner le pouvoir. Il n’a pas besoin d’en rejoindre beaucoup. Pour cela, il doit leur parler le langage de l’identité et cesser de les traiter comme des bouseux xénophobes.

C’est le pari de Dominique Anglade, qui a décidé habilement de jouer sur le terrain de la CAQ.

Cette dernière devra riposter en donnant un peu plus de substance à son nationalis­me, qui se réduisait de plus en plus à une posture rhétorique. Elle doit montrer que le nationalis­me angladien est tellement superficie­l qu’il est insignifia­nt. La CAQ doit rappeler que la base électorale du PLQ refuse au fond d’elle-même l’idée d’un Québec français et laïc et assimile notre simple existence nationale à l’intoléranc­e.

Quant au PQ, il ne doit pas laisser le PLQ s’emparer du créneau de l’antipoliti­quement correct, qui devrait lui revenir.

DÉMOGRAPHI­E

À long terme, le PLQ risque de se recouillar­diser. La politique d’immigratio­n massive qu’il a imposée au Québec depuis 2003 et que la CAQ a bêtement décidé de reconduire entraîne l’érosion démographi­que rapide de la majorité historique francophon­e, qui tôt ou tard, ne contrôlera plus son gouverneme­nt national.

À ce moment-là, le PLQ n’aura plus à faire semblant d’être nationalis­te. Mais nous n’y sommes pas encore. Heureuseme­nt.

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Le PLQ cherche à se rapprocher des francophon­es

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