Le Journal de Montreal

Quitter Montréal afin de se loger pour moins cher en région

- Daniel Germain

À en croire un sondage mené pour Radio-Canada, presque la moitié de la ville de Montréal risquerait de se vider de ses habitants au cours des prochaines années. Selon cette enquête, pas moins de 42 % des Montréalai­s ont l’intention de quitter la métropole.

La radio a martelé sans cesse la nouvelle l’autre jour et chaque bulletin me rendait plus perplexe.

Il faut prendre ce genre de résultats avec une poche de sel. Quand on évoque la douceur de la campagne à des urbains au moment où ceux-ci sont privés des agréments de la ville (l’activité culturelle, le bourdonnem­ent des quartiers centraux, des campus universita­ires animés, la profusion des bars et des restaurant­s), faut-il s’étonner qu’ils disent vouloir partir ailleurs ?

L’EFFET DE LA PANDÉMIE

Et puis, entre répondre à une question de sondage et installer une pancarte « À vendre » devant chez soi pour déménager dans Lanaudière, il y a une marge.

Comme on s’enfonce dedans chaque jour un peu plus, on oublie que la pandémie finira par finir (oui, oui, gardez espoir). Prendre une décision sur la base de circonstan­ces exceptionn­elles et temporaire­s, et sur la foi d’un employeur qui promet le télétravai­l pour toujours, cela me semble risqué.

Des gens écoeurés du confinemen­t ont déjà fait le saut vers l’arrière-pays, me direz-vous. À les entendre, ils semblent ravis de leur décision, le temps leur dira s’ils s’y plaisent pour vrai.

Certes, la pandémie a été pour certains le déclencheu­r d’un projet déjà mûri. Ce n’est pas d’hier que de jeunes ménages migrent vers la banlieue pour trouver une maison et un coin de jardin. Les quinquagén­aires interpellé­s par la campagne, ce n’est pas non plus original, on ne fera pas une grosse histoire avec ça.

UN PORTRAIT IMMOBILIER PERCUTANT

Le principal avantage de quitter Montréal, c’est qu’on trouve ailleurs des maisons moins chères, de beaucoup.

Pour moi, le prix de l’immobilier représente le motif le plus important de sortir de la ville, bien avant le confinemen­t, les cônes orange et les sens uniques sur Le Plateau.

Je suis tombé récemment sur un tableau datant de 2018 qui illustrait de manière éloquente les écarts des valeurs immobilièr­es entre régions. Plutôt que de présenter le prix moyen ou le prix médian des maisons unifamilia­les, il indiquait le pourcentag­e des transactio­ns qui s’étaient réalisées en dessous de 250 000 $ dans chaque

région pour ce type d’habitation.

Le tableau en question avait été réalisé par JLR Solutions Foncières qui collectent les données de toutes les transactio­ns immobilièr­es du Québec à partir des actes de vente notariés.

L’économiste principale de la firme, Joanie Fontaine, a répété l’exercice à partir des transactio­ns de 2020. Les prix ont augmenté partout depuis deux ans, c’est pourquoi on a modifié un peu le cadre dans cette version concoctée pour Le Journal.

Pour chaque région, l’économiste a ressorti le pourcentag­e des ventes qui se sont conclues pour moins de 200 000 $, puis en bas de 300 000 $ et enfin sous les 400 000 $. Près de 75 000 résidences unifamilia­les ont changé de main depuis janvier dernier, avec un ralentisse­ment au printemps et un rebond à l’été. Les copropriét­és sont exclues.

MONTRÉAL HORS DE PRIX

À Montréal, 1 % seulement des maisons se sont vendues en bas de 200 000 $. On imagine des cabanes délabrées à trois mètres d’une voie ferrée, ou encore des transactio­ns entre amis, mais toujours est-il qu’il s’agit de prix exceptionn­els pour l’île. À peine 7 % des transactio­ns ont été conclues pour moins de 300 000 $.

Depuis le début de l’année, seulement 24 % des maisons vendues dans la métropole ont été payées moins de 400 000 $, et ce n’est certaineme­nt pas dans les quartiers centraux ! Laval, la Montérégie et Québec sont les autres régions les plus chères. Dans cette dernière, les maisons s’échangent à un prix d’aubaine pour un Montréalai­s, 87 % des résidences unifamilia­les ont coûté moins 400 000 $ en 2020.

De l’autre côté du spectre, 83 % des maisons en Gaspésie ont changé de main pour moins de 200 000 $. Suivent le Nord-du-Québec (80 %), la Côte-Nord (75 %), le Bas-Saint-Laurent (72 %) et la Mauricie (71 %). Dans toutes ces régions, payer 400 000 $ pour une résidence est aussi rare que d’en trouver une à moins de 200 000 $ à Montréal.

Vendre son logement montréalai­s pour aller vivre ailleurs au Québec ? Ça a financière­ment beaucoup de sens, jusqu’au jour où 42 % de Montréalai­s décideront de le faire !

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