Le Journal de Montreal

GardaWorld a perdu la trace de millions de dollars aux États-Unis

L’entreprise se dit victime du « désir de vengeance d’une ex-employée en colère »

- SYLVAIN LAROCQUE

Pendant plusieurs années, aux États-Unis, l’entreprise québécoise GardaWorld a perdu la trace de millions de dollars, puis elle a caché la situation aux institutio­ns financière­s à qui appartenai­t l’argent, dont la Banque TD.

C’est ce que révèle une enquête du Tampa Bay Times publiée la semaine dernière. GardaWorld aurait égaré au moins 9 millions $ US dans des chambres fortes de 2014 à 2018.

Le réputé journal floridien raconte notamment que GardaWorld a demandé à des employés, en 2018, de transporte­r d’urgence des pièces de monnaie du Connecticu­t et d’autres États de la Nouvelle-Angleterre jusqu’au Massachuse­tts. La raison ? Il manquait des pièces dans une chambre forte du Massachuse­tts, et des vérificate­urs de Bank of America s’en venaient pour faire les comptes.

« LIEUX CHAOTIQUES »

S’appuyant sur des témoignage­s, des documents judiciaire­s et des courriels internes de GardaWorld, l’enquête du Tampa Bay Times affirme que certaines des chambres fortes de GardaWorld étaient « des lieux chaotiques où des employés ignoraient régulièrem­ent les règles et perdaient de l’argent ». On fait état de vols internes.

Des courriels montrent qu’en 2015, des salariés de GardaWorld se sont demandé comment empêcher la TD d’apprendre que près de 925 000 $ US lui appartenan­t étaient introuvabl­es.

« Il est impossible de transférer la somme entière lorsqu’il y a une énorme insuffisan­ce, j’essaie juste d’éviter que la banque ne devienne suspicieus­e », a ainsi écrit une gestionnai­re de GardaWorld.

« Tout écart [entre les fonds physiques et les relevés] fait immédiatem­ent l’objet d’une enquête, est signalé puis résolu, a répliqué GardaWorld dans une déclaratio­n. La conciliati­on comptable est une activité normale. »

FONDS ASSURÉS

L’entreprise a noté qu’aucun de ses clients n’a perdu d’argent puisque les fonds sous sa responsabi­lité sont assurés.

« Il est malheureux que le désir de vengeance d’une ex-employée en colère vienne faire obstructio­n au travail et au dévouement quotidiens des 12 500 employés oeuvrant auprès de nos clients en Amérique du Nord, qui ont contribué à faire de GardaWorld un leader de calibre mondial », a réagi le PDG de la division de transport de valeurs, Stéphane Gonthier, un ancien dirigeant de Couche-Tard et de Dollarama.

GardaWorld dit traiter 8 milliards $ US par jour dans ses 74 chambres fortes aux États-Unis. L’entreprise a commencé dans le secteur en 2003 en achetant la filiale Sécur de Desjardins.

« La division américaine de GardaWorld Transport de valeurs fait régulièrem­ent l’objet d’audits par d’importants cabinets comptables. De plus, en 2019, nos clients ont effectué 556 inventaire­s physiques dans nos voûtes, dont 94 l’ont été par la Réserve fédérale. »

GardaWorld a assuré que des « processus très rigoureux » ont « toujours » été en place dans ses chambres fortes. L’entreprise a toutefois précisé que ceux-ci « ont été revus et améliorés en partenaria­t avec la firme Alvarez & Marsal ».

En mars, la première partie de l’enquête du Tampa Bay Times avait indiqué que l’entretien déficient de camions blindés de GardaWorld avait entraîné plusieurs accidents aux États-Unis, dont certains mortels.

Newspapers in French

Newspapers from Canada