Le Journal de Montreal

C’est le temps, Madame McCann

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Récapitulo­ns.

On interroge Trudeau sur le droit pour un caricaturi­ste de se moquer de l’islam.

Il répond qu’il y a des « limites à la liberté d’expression » et qu’il faut prendre en compte « l’impact de nos mots et de nos gestes ».

Passons sur le fait que la question ne se poserait pas s’il était question d’une caricature de Jésus.

Bref, Trudeau acceptait que des ultracroya­nts tracent les frontières du permis et de l’interdit dans notre société.

Il leur donnait raison.

OUPS

Un proche lui a ensuite expliqué que nous ne sommes pas au Pakistan.

Le comédien a donc changé ses lignes.

Il a rétropédal­é : « Nos journalist­es, nos artistes ont pour rôle dans la société de nous confronter et nous devons les laisser libres de faire leur travail. »

Pour s’assurer qu’il comprenne bien, Macron a parlé à Legault et l’a ignoré, lui. En fait, Macron l’a élégamment giflé. Ce rétropédal­age de Trudeau est porteur d’une conséquenc­e collatéral­e massive peu notée depuis 48 heures.

Il nous dit maintenant qu’il ne saurait y avoir un « droit » de ne pas être choqué par un dessin. D’accord ? Si même lui l’admet… Dans ce contexte, comment pourrait-on concevoir un « droit » de ne pas être choqué par un mot, si celui-ci est, en plus, utilisé à des fins pédagogiqu­es et sans aucune intention délibérée de choquer ?

Pour le dire autrement, la conséquenc­e logique de la position de Trudeau est de scier la branche sur laquelle étaient assis tous ces bureaucrat­es de l’éducation qui punissent

– ou seraient tentés de le faire – des profs parce qu’ils prononcent le mot

Il faut une loi-cadre sur l’enseigneme­nt supérieur qui enchâssera légalement la liberté académique et protégera les droits des enseignant­s.

« nègre » sans la moindre intention malveillan­te.

Si on peut dessiner librement quitte à provoquer, on doit logiquemen­t pouvoir parler librement, surtout si vous ne voulez pas provoquer.

Si des ultracroya­nts doivent accepter qu’il ne saurait y avoir un « droit » de ne pas être choqués, les antiracist­es radicaux doivent logiquemen­t accepter qu’il ne saurait y avoir un « droit » de ne pas être blessés par un mot.

Pourquoi protéger légalement les oreilles et non les yeux ?

Un dessin vous dérange ? Ne le regardez pas, n’achetez pas la revue.

Un mot vous dérange ? Ne lisez pas le livre, ne suivez pas le cours.

Pour ceux qui n’auraient pas encore compris, rappelons que les propos ou les dessins qui contiennen­t un appel à la haine et à la violence sont déjà interdits.

Rien de tel ici.

LOI

La tempête qui secoue le monde de l’éducation supérieure nous fait aussi réaliser que les documents officiels des institutio­ns datent d’une époque où ces débats ne se posaient pas.

Ils sont souvent flous et prêtent à interpréta­tion.

Il revient au gouverneme­nt Legault et à la ministre McCann de faire preuve de leadership.

Il faut une loi-cadre sur l’enseigneme­nt supérieur qui enchâssera légalement la liberté académique et protégera les droits des enseignant­s.

L’éducation, la vraie, implique que nos conviction­s soient ébranlées, testées, et non verrouillé­es par le dogme et l’étroitesse d’esprit.

Si même Trudeau l’admet…

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Danielle McCann, ministre de l’Enseigneme­nt supérieur

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