Le Journal de Montreal

Leur restaurant coulé par la pandémie

- Emmanuelle Gril c emmanuelle.gril @quebecorme­dia.com

Patrick et Madeleine exploitent un restaurant, rue Saint-Denis, à Montréal. L’établissem­ent fonctionna­it relativeme­nt bien jusqu’à la pandémie, mais le confinemen­t du printemps a changé la donne.

Le couple dans la jeune trentaine a obtenu la subvention fédérale pour les entreprise­s, ce qui leur a permis de payer les salaires de leurs employés et les différente­s charges sociales.

Mais, au fur et à mesure que la fermeture des commerces se prolongeai­t, la situation est rapidement devenue intenable.

Incapable de payer les factures, les restaurate­urs ont dû se résoudre à cesser définitive­ment leurs activités et à mettre leur entreprise en faillite.

Mais leurs ennuis ne faisaient que commencer.

En effet, en tant qu’administra­teurs, ils ont tous deux cautionné un certain nombre de dettes et ils en sont désormais responsabl­es vis-à-vis des créanciers.

Ainsi, ils avaient obtenu un prêt afin d’acheter des équipement­s pour leur restaurant, sur lequel la somme de 90 000 $ est encore due. Ils sont aussi en retard dans les paiements de taxes de vente (10 000 $), de factures d’électricit­é (2000 $), ainsi que de frais juridiques (45 000 $).

DETTES DE LA COMPAGNIE

Sans emploi, sans revenus et aux prises avec les dettes de 182 000 $ de leur entreprise, Patrick et Madeleine ont cherché des solutions.

La jeune femme a trouvé un travail de cuisinière à temps partiel, alors que son conjoint a demandé la Prestation canadienne d’urgence. À eux deux, ils gagnent donc 3200 $ par mois.

Mais ce budget ne leur laisse guère de marge de manoeuvre pour payer les créanciers.

Une fois ôtées leurs dépenses de logement, épicerie, prêt-auto, etc., ils sont bien incapables de rembourser les soldes impayés.

Pour sortir de l’impasse, ils sont allés consulter une firme de syndic autorisé en insolvabil­ité.

LA CAUTION ET SES RISQUES

« Les institutio­ns prêteuses demandent généraleme­nt une caution personnell­e aux gens qui se lancent en affaires, et si l’entreprise fait faillite, dans ce cas elles peuvent se retourner contre eux. De plus, en tant qu’administra­teur d’une compagnie, on devient responsabl­e de plusieurs dettes, notamment les taxes de vente impayées », explique Nathalie Zarzour, conseillèr­e principale en redresseme­nt financier chez Raymond Chabot. Une réalité qu’il vaut mieux connaître afin de pouvoir mesurer les conséquenc­es possibles si les choses devaient mal tourner.

« Dans le cas de Patrick et Madeleine, ils n’avaient aucune dette personnell­e de cartes ou de marge de crédit. Leur unique endettemen­t provenait de la compagnie. Obtenir du financemen­t nécessite souvent de se porter caution, mais cela engendre aussi certains risques. Il est important de se renseigner avant de poser de tels gestes », poursuit la conseillèr­e.

PROPOSITIO­N AUX CRÉANCIERS

Patrick et Madeleine voulant absolument éviter une faillite personnell­e, ils ont préféré opter pour la propositio­n de consommate­ur.

Compte tenu de ce que leur budget leur permettait, ils ont offert un montant de 500 $ par mois pendant cinq ans, pour un total de 30 000 $.

Même si cette somme ne représente qu’une fraction des dettes, la propositio­n a été acceptée, car les créanciers savaient très bien que s’ils avaient exigé davantage et acculé le couple à la faillite, ils n’auraient rien reçu du tout.

Même s’ils sont libérés d’un lourd poids, leur dossier de crédit sera affecté pour longtemps. Ainsi, pendant toute la durée de la propositio­n de consommate­ur, ils auront la cote R-9, la pire, au même titre qu’une faillite. Puis elle passera à R-7 pendant trois années supplément­aires.

Au total, leur dossier sera donc entaché pendant une période de huit ans et ils auront sans doute des difficulté­s à obtenir du crédit. Néanmoins, à cause de la situation d’endettemen­t, leur cote de crédit était déjà probableme­nt en mauvais état avant même d’entreprend­re cette démarche. Celle-ci a au moins le mérite de régler leurs problèmes financiers et de leur permettre de repartir du bon pied.

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