Le Journal de Montreal

La réalité a changé

- MARIO mario.dumont@quebecorme­dia.com DUMONT

Il y a un monde de différence entre la mise à jour économique présentée hier par le ministre québécois des Finances et le budget qu’il avait déposé en mars. Le Québec était dans sa meilleure santé financière depuis plus d’un demi-siècle. Nous avons aujourd’hui le pire déficit de notre histoire.

L’exercice d’hier constitue quand même un douloureux rappel de la faiblesse du budget déposé en mars dernier. Alors que la pandémie était à nos portes, quelques jours à peine avant les premières fermetures, le budget ne mentionnai­t même pas l’existence des risques de la COVID-19. Courte vue.

Quoi qu’il en soit, le déficit du Québec atteint maintenant 15 milliards. On prévoit un autre 15 milliards dans le trou pour les deux années suivantes. De quoi revoir ses plans.

INCERTITUD­E

Les prochains mois comportent encore une bonne part d’incertitud­e.

Malgré les nouvelles encouragea­ntes concernant les vaccins, nous sommes toujours happés par une deuxième vague de la pandémie dont nous ne voyons pas la fin. Et les experts parlent déjà d’une troisième vague !

Le portrait financier présenté hier remet en question toute la négociatio­n avec les employés de l’État.

Le gouverneme­nt Legault avait déposé une offre prévoyant des hausses salariales de 9 % sur cinq ans pour tous. Pour certains groupes, comme les enseignant­s et les infirmière­s, le gouverneme­nt acceptait d’en rajouter dans le cadre de négociatio­ns ciblées.

Les syndicats du secteur public ont refusé de signer une entente sur cette base au printemps. Erreur. Je comprends bien qu’ils s’étaient monté un scénario optimiste dans lequel le secteur public allait décrocher des augmentati­ons solides. Hourra, les surplus ! la porte était ouverte pour de grandes ambitions d’augmentati­ons salariales.

Malheureus­ement, le monde a changé. Non seulement le gouverneme­nt ne devrait pas bonifier son offre, mais l’offre du gouverneme­nt devrait même être retirée. Vous me direz que des hausses de 2 % par année, c’est peu ? Sur la masse salariale du gouverneme­nt québécois, 2 % de plus aux employés, c’est presque un milliard supplément­aire annuelleme­nt.

AU NOM DE NOUS TOUS

Beaucoup de travailleu­rs se retrouvent présenteme­nt dans l’incertitud­e. Et dois-je vous parler des restaurate­urs, des commerçant­s, des travailleu­rs autonomes ?

En présence d’autant d’inconnu et d’un déficit record, le gouverneme­nt devrait éviter de s’engager en notre nom à tous à verser des milliards supplément­aires pour les cinq prochaines années.

Le gouverneme­nt devrait travailler à régler les urgences comme les infirmière­s, notamment leurs problèmes d’organisati­on du travail.

Même chose avec des cas particulie­rs déjà identifiés comme les préposés aux bénéficiai­res ou les enseignant­s en début de carrière.

Mais il devrait reculer d’un pas dans l’idée de signer des augmentati­ons à long terme pour son demi-million d’employés.

Les travailleu­rs du secteur public ne sont pas surpayés. Ils ne sont pas des gars durs.

Ces stéréotype­s sont faux. Mais la prétention véhiculée dans les publicités qu’ils seraient des laissés-pourcompte de la société est aussi fausse.

Les gens qui ont perdu brutalemen­t leur emploi pendant la pandémie pourront témoigner de la valeur d’une sécurité d’emploi.

Qui sait de quoi aura l’air l’économie dans un an ou deux ?

Newspapers in French

Newspapers from Canada