Le Journal de Montreal

Merci, Emmanuella et Chelsea

- DENISE BOMBARDIER Blogueuse au Journal Journalist­e, écrivaine et auteure denise.bombardier @quebecorme­dia.com

La députée libérale de Saint-Laurent, Emmanuella Lambropoul­os, et la présidente du PLC au Québec, Chelsea Craig, ont parlé sans filtre. Selon la première, le français au Québec n’est pas en déclin et pour la seconde, la loi 101, qui lui dicte quelle langue utiliser, est oppressive.

Justin Trudeau, en 2012, avant d’accéder au pouvoir ne souhaitait pas que la loi 101 soit renforcée malgré le recul du français au Québec. « Il faut éviter de relancer les vieux débats sur la langue. Un resserreme­nt de la loi pénalisera­it les francophon­es désireux d’offrir de meilleures perspectiv­es d’avenir à leurs enfants. »

Cette semaine, les deux jeunes libérales se sont vite fait tancer. D’abord par leur consoeur, ministre responsabl­e des Langues officielle­s, Mélanie Joly, qui a réagi en utilisant trois adjectifs, « stupéfaite », « abasourdie » et « déçue ». C’est sa manière de servir son chef, le prince des mea culpa.

PROTECTION FÉDÉRALE

Justin Trudeau, lui, affirme, la main sur le coeur, qu’il est un défendeur de la loi 101. Sauf qu’il refuse encore que les entreprise­s sous juridictio­n fédérale soient assujettie­s à cette loi. On peut penser que Justin

Trudeau, face à la possibilit­é d’un déclenchem­ent d’élection, serait mal venu de céder à cette demande venant du premier ministre Legault, un nationalis­te dont il ne doit pas faire souvent l’éloge. La loi 101, réveillons-nous, n’aura jamais l’appui des anglophone­s ou des allophones. Sauf chez quelques excentriqu­es attendris par le sort des petits peuples minoritair­es.

N’oublions pas par contre que le Québec français permet au Canada de se distinguer encore des États-Unis. Malheureus­ement, le pays est engagé sur la voie d’une américanis­ation culturelle et politique galopante.

Le Canada est anglophone, mais en réalité il est devenu multilingu­e et l’anglais est avant tout l’instrument de communicat­ion entre ses habitants d’un océan à l’autre. D’ailleurs, c’est sa diversité culturelle qui est mise de l’avant par Justin Trudeau et non sa langue, qui n’est plus portée par le nationalis­me canadien-anglais du siècle dernier avec ses écrivains, entre autres, qui ont incarné la culture canadienne encore fortement influencée par l’Angleterre de l’époque.

INDIFFÉREN­CE

Le français est en recul au Québec et les communauté­s francophon­es hors Québec ne sont que l’ombre d’elles-mêmes à cause de l’indifféren­ce canadienne. Il y a un an, je suis retournée dans les communauté­s francophon­es au Manitoba, en Ontario et au Nouveau-Brunswick pour faire un documentai­re que Radio-Canada a diffusé en octobre 2019.

Ce fut une expérience douloureus­e à vrai dire. Non seulement les francophon­es sont à l’évidence en train de disparaîtr­e sous la pression des vagues d’immigrants, mais ils nous renvoient l’image de notre propre déclin. Cela n’enlève rien à la dignité de leur combat.

Emmanuella et Chelsea ont dit tout haut ce qu’on pense d’un océan à l’autre de l’unilinguis­me officiel du Québec. Leurs excuses sont une insulte à notre intelligen­ce. Comme les propos changeants de Justin Trudeau sur la loi 101 selon les enjeux politiques du moment.

Les Québécois doivent imposer leur loi chez eux. En comprenant que ce n’est pas la Cour suprême qui va décider pour eux. C’est leur gouverneme­nt élu à la majorité et qui aura le courage de ses ambitions en temps et lieu.

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Le flottement ne permet jamais l’ancrage.
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