Le Journal de Montreal

Au chevet du français

- MAKA KOTTO Ex-ministre de la Culture et des Communicat­ions maka.kotto@quebecorme­dia.com

De l’Assemblée nationale à la Chambre des communes, il y a aujourd’hui une prise de conscience unanime sur le déclin du français au Québec et au Canada. À l’évidence, le glas de la lucidité vient de sonner. Il était temps... Il reste cependant à entendre celui de la cohérence et celui de l’action !

Les chiffres sont têtus. Toutes les études et les avis confirmera­ient le recul du français au Québec, et particuliè­rement à Montréal. Mais ils étaient légion celles et ceux qui persistaie­nt à dire que le visage français du Québec est bien assuré.

Cohérence et action sont donc de mise, car la situation devient de plus en plus complexe, voire ingérable. L’état de la santé du français au Québec et au Canada nécessite, au plus vite, un « protocole thérapeuti­que » vigoureux, car il se pourrait que les jeux soient déjà faits...

LE PARADOXE

Le Québec est censé être aussi francophon­e que l’Ontario, la Colombie-Britanniqu­e ou le Canada, en général, sont anglophone­s. Or, le français, langue de la minorité, n’y est pas aussi omnipotent que l’anglais l’est au Québec.

Les anglophone­s québécois « de souche » représente­nt bien moins de 10 % de la population du Québec selon les données statistiqu­es. Je n’oserais donc pas croire que c’est à cause d’eux que Montréal et l’ensemble du Québec, via ses institutio­ns, s’anglicisen­t autant.

LA DÉMOGRAPHI­E

Le faible taux de natalité et les migrations francophon­es vers les banlieues n’aident pas la cause du français à Montréal.

La vaste majorité des personnes étrangères accueillie­s au Québec chaque année depuis près d’une génération ne maîtrisent pas le français. Elles n’y viennent certaineme­nt pas pour apprendre cette langue. Elles viennent se réaliser « au Canada ».

Le poids du nombre aidant, la langue dominante de communicat­ion et de travail au Canada est indubitabl­ement, à leurs yeux, l’anglais. C’est sans problème qu’ils peuvent vivre uniquement en anglais à Montréal. Pour la majorité des emplois, la connaissan­ce de l’anglais y est exigée. Pas celle du français...

TRÊVE D’AMBIGUÏTÉS

Les mesures peu convaincan­tes en matière de francisati­on doivent être revues de fond en comble.

Par ailleurs, la forte attraction des oeuvres de l’esprit du grand voisin étatsunien, avec ses chevaux de Troie culturels et artistique­s, appelle des réponses appropriée­s. Surtout pour nos jeunes, plus enclins à y succomber.

L’ensemble des Québécois et ses élites politiques doivent contribuer avec déterminat­ion au sauvetage du français. Cette langue est la sève de notre identité collective au Québec.

ÉVITER LES THÉRAPIES DE FAÇADE

Identifier et circonscri­re avec efficience tous les foyers d’anglicisat­ion au sein des institutio­ns, des organismes, des entreprise­s et des commerces au Québec est fondamenta­l et urgent.

Au milieu de notre espace de plus en plus dominé par l’anglais, protéger le français de façon durable nécessiter­a une révolution culturelle avec des moyens et une volonté politiques à la hauteur d’une telle ambition. Il en va de notre santé collective.

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L’état de la santé du français au Québec et au Canada nécessite, au plus vite, un « protocole thérapeuti­que » vigoureux.
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