Le Journal de Montreal

L’hypocrisie

- MARIO DUMONT mario.dumont@quebecorme­dia.com

Je vous fais une révélation : nos gouverneme­nts ont besoin d’argent. Beaucoup, toujours, désespérém­ent. La mauvaise nouvelle : rien ne rend un gouverneme­nt plus impopulair­e que de passer la gratte dans nos poches. Alors si vous leur offrez de l’argent facile…

Préambule nécessaire pour vous parler de ces reportages renversant­s de notre Bureau d’enquête concernant les liens entre le Casino de Montréal et les bonzes du crime organisé. Personne ne peut saisir le dossier s’il oublie le point fondamenta­l : l’appétit du gouverneme­nt pour des revenus.

Loto-Québec représente une vache à lait pour le gouverneme­nt. Avant la pandémie, cette société d’État remettait annuelleme­nt au ministre des Finances entre 1,3 et 1,4 milliard $. Au fil des ans, les casinos sont devenus la première source de revenus de Loto-Québec.

L’OUVERTURE DES CASINOS

Lorsque le gouverneme­nt a mandaté Loto-Québec pour ouvrir des casinos en 1993, le but annoncé était de tasser le crime organisé et de favoriser le tourisme. Mais le but non avoué numéro un consistait à ramener de l’argent dans les coffres. À l’époque, Loto-Québec commençait à sentir un fléchissem­ent de la demande pour la loterie traditionn­elle.

Alors vous pensez quoi ? Qu’aujourd’hui le gouverneme­nt n’est pas heureux de voir rentrer l’argent ?

Que le ministre des Finances ne met pas une certaine pression sur Loto-Québec pour cracher davantage (peu importe l’individu ou le parti au pouvoir) ?

Que le salon des hautes mises n’est pas important dans l’atteinte des objectifs de rendement ?

Et qui joue au salon des hautes mises, des paris à coups de milliers de dollars sur la table ? Pas beaucoup de salariés qui gagnent leur paye heure par heure. Des gens à très hauts revenus, bien sûr… et des gens qui font des revenus illégaux.

Un exemple où le gouverneme­nt sait qu’il ne veut pas savoir.

VEUT-ON VRAIMENT SAVOIR ?

Bien sûr, cela ne veut pas dire que nos élus approuvent la relation indécente qui s’est développée entre le Casino de Montréal et des personnage­s sulfureux. Mais ont-ils pris le risque de poser toutes les questions ? Au risque de se priver de revenus ?

Voilà l’hypocrisie, tous les gouverneme­nts veulent traire la vache LotoQuébec jusqu’à la dernière goutte. D’où vient l’argent ? On laisse ça à Loto-Québec et on préfère peut-être ne pas le savoir.

Ainsi mandatée pour générer des profits, on se rend aujourd’hui compte que la société d’État a perdu ses repères éthiques les plus élémentair­es.

Le Casino est visiblemen­t devenu un facilitate­ur en matière de blanchimen­t d’argent. Et pour remercier les membres du crime organisé qui viennent blanchir leur fric, le Casino ajoute des cadeaux de luxe.

Le dossier du Bureau d’enquête lève le voile sur des pratiques gênantes. C’est loin d’être une enquête exhaustive sur la présence de criminels au Casino. Les experts nous parlent de la mafia asiatique, de la mafia russe, des gangs de rue, etc.

En résumé, il y a beaucoup de nondits derrière cette histoire. Et vous savez ce qui arrive lorsqu’il y a trop de non-dits ?

On ne peut plus parler. Loto-Québec a refusé toutes les demandes d’entrevues.

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