Le Journal de Montreal

Peine réduite à 25 ans pour Alexandre Bissonnett­e

La Cour d’appel estime que le châtiment de 40 ans imposé est « cruel et inusité »

- KATHLEEN FRENETTE

QUÉBEC | La peine d’emprisonne­ment ferme de 40 ans infligée en première instance au tueur de la mosquée, Alexandre Bissonnett­e, est « cruelle et inusitée » et le cumul des peines est « inconstitu­tionnel », selon la Cour d’appel qui a ramené le châtiment à 25 ans.

Les juges François Doyon, Guy Gagnon et Dominique Bélanger ont d’abord signifié que la décision rendue ne portait pas « sur l’horreur des gestes posés par Alexandre Bissonnett­e ni même sur l’impact de ses crimes sur toute une communauté », mais qu’elle portait d’abord et avant tout, « sur la constituti­onnalité d’une dispositio­n du Code criminel ».

LE CARNAGE

Une dispositio­n que le gouverneme­nt Harper a modifiée en 2011 et qui stipulait qu’en cas de meurtres multiples, les juges pouvaient ordonner, en plus de l’emprisonne­ment à perpétuité, des périodes d’inadmissib­ilité à la libération conditionn­elle cumulative de 25 ans pour chaque meurtre commis. Le 27 janvier 2017, Bissonnett­e a ouvert le feu dans la grande mosquée où il a tué six hommes en plus d’en blesser huit autres.

RÉHABILITA­TION

Au Canada, « chacun a droit à la protection contre tous traitement­s ou peines cruels et inusités », ont-ils noté.

« Un tribunal ne doit pas rendre une ordonnance qui ne peut jamais se réaliser », ont d’ailleurs ajouté les juges en spécifiant qu’un délinquant qui ne peut entreprend­re une démarche de réhabilita­tion discrédite l’administra­tion de la justice.

« Cette disproport­ion pourrait bien satisfaire l’esprit vengeur. Pourtant, la vengeance n’a aucun rôle à jouer dans un système civilisé de déterminat­ion de la peine », ont-ils précisé.

En réaction à cette importante décision rendue par la Cour d’appel, le porte-parole du Directeur aux poursuites criminelle­s et pénales, Me Christian Leblanc, a fait savoir qu’ils avaient d’abord « une pensée spéciale pour les victimes, leurs proches et la communauté, qui doivent revivre ces événements tragiques à chaque étape judiciaire ».

« Le jugement est étoffé et traite de plusieurs questions de droit complexes », a-t-il fait savoir en ajoutant que le DPCP allait en faire une analyse attentive en collaborat­ion avec le procureur général du Québec ».

« DÉCISION MAJEURE »

Les avocats de Bissonnett­e, Me Charles-Olivier Gosselin et Me JeanClaude Gingras ont souligné, quant à eux, l’importance de cette décision.

« Il s’agit d’une décision majeure pour le respect des droits de la personne au Québec et au Canada, qui reflète les valeurs progressis­tes et l’importance des droits fondamenta­ux institués dans notre société », ont-ils mentionné, ajoutant qu’ils étaient « très satisfaits de cette décision rendue de façon unanime ».

Newspapers in French

Newspapers from Canada