Le Journal de Montreal

Simon Jolin-Barrette a-t-il un avenir ?

- DENISE BOMBARDIER denise.bombardier @quebecorme­dia.com

Il ne manque ni de courage ni de conviction. Le jeune ministre responsabl­e de la langue française doit de toute évidence calmer encore ses ardeurs.

Il connaît dans les moindres détails quel sera l’état quasi calamiteux de l’avenir du français à Montréal s’il n’y a pas d’interventi­on de sa part. La patience du ministre est mise à rude épreuve. À cause de son protecteur dans un passé encore récent, le premier ministre François Legault.

Après sa sortie surréalist­e cette semaine – et en un sens inexplicab­le –, alors que Jolin-Barrette s’est limité à préciser le nouveau projet de loi 101 supposémen­t amélioré, mais qu’il n’a pas encore le mandat d’annoncer, on peut s’inquiéter sérieuseme­nt.

Comment interpréte­r ses paroles quand il déclare être en « réflexion » sur la possibilit­é d’allonger l’obligation d’étudier en français jusqu’au cégep pour les immigrants et les francophon­es ?

VOIE ROYALE

L’expansion au coût de 50 millions du cégep Dawson, un projet du gouverneme­nt Couillard, se justifie par l’offre et la demande. Les étudiants, pour une partie parmi les meilleurs, piaffent d’impatience de s’inscrire dans le système anglais. Pour les immigrants, c’est la voie royale pour s’intégrer dans le Canada multicultu­rel auquel ils s’identifien­t d’abord.

Le premier ministre Legault refuse, lui, d’interdire l’accès des cégeps anglophone­s aux étudiants francophon­es. Au nom du pragmatism­e qui le caractéris­e ? Sans doute. Mais l’évolution démographi­que du Québec ne devrait-elle pas alerter le nationalis­te qu’est l’ex-ministre péquiste ?

Quelles sont les solutions politiques envisagées par le défenseur de l’identité québécoise pour contrer l’attrait irréversib­le, à l’évidence, de l’anglais ? Auquel cède même un pays comme la France, qui introduit l’anglais dans ses grandes écoles, comme HEC et les instituts d’études politiques, des lieux, précisons-le, où l’on forme l’élite dirigeante française.

Les étudiants qui sont formés dans les lycées français jusqu’au baccalauré­at reçoivent une éducation de haut niveau intellectu­el où le français, l’histoire et la philosophi­e leur permettent d’appréhende­r la culture universell­e en français.

ASSIMILATI­ON

Qui peut prétendre qu’un finissant de l’école secondaire au Québec a reçu en français un solide bagage culturel ? Quelle est la qualité de sa langue écrite et parlée ? A-t-il suffisamme­nt de repères en histoire ou en français pour entrer dans la culture anglophone, et est-il suffisamme­nt bien armé pour résister à une assimilati­on dans le contexte anglophone de notre minorisati­on historique en Amérique du Nord ?

François Legault peut-il à la fois défendre la conception française de la

laïcité et ouvrir les portes de l’anglicisat­ion à une jeunesse québécoise pour qui le nationalis­me est un concept archaïque ? Et pour qui la laïcité est une forme de racisme.

Le gouverneme­nt Legault ne peut pas livrer le système d’éducation francophon­e public à l’assimilati­on inéluctabl­e.

François Legault ne peut pas en son âme et conscience de Québécois nationalis­te, mais toujours pragmatiqu­e, terminer politiquem­ent la tâche héritée de l’antination­aliste Philippe Couillard. L’investisse­ment à hauteur de 50 millions de l’agrandisse­ment du collège Dawson est intolérabl­e pour quiconque se prétend le protecteur du Québec français.

Après les cégeps, ce sera le tour de l’université. D’ailleurs, c’est déjà fait dans quelques facultés. François Legault, artisan de notre disparitio­n progressiv­e ? Il y a de quoi être découragé collective­ment !

 ??  ?? La fierté d’être Québécois est-elle en voie d’affadissem­ent ?
La fierté d’être Québécois est-elle en voie d’affadissem­ent ?
 ??  ??
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada