Plus de mordant pour en finir avec les ratés de la DPJ
La commission Laurent réclame un « ange gardien et chien de garde »
La commission formée par le gouvernement à la suite de la mort d’une fillette maltraitée à Granby l’an dernier réclame la nomination rapide d’un directeur national pour donner le coup de barre nécessaire à la DPJ.
La Direction de la protection de la jeunesse (DPJ) a besoin de plus d’imputabilité et de leadership, conclut la Commission spéciale sur les droits des enfants et la protection de la jeunesse, à la suite des ratés qui ont fait la manchette ces derniers mois.
La présidente, Régine Laurent, a présenté hier une recommandation au gouvernement, estimant qu’il y a « urgence d’agir », dans l’attente du dépôt du rapport final, reporté au mois d’avril.
Le directeur national que propose la commission aurait les pouvoirs d’un sousministre, pour freiner ce qu’elle appelle une « hémorragie du leadership ». Servant d’« ange gardien et de chien de garde », il aurait la tâche d’assurer la qualité des services et de les uniformiser d’une région à l’autre.
DIFFÉRENT SELON LES RÉGIONS
Mme Laurent a souligné que la commission avait mis en lumière des « disparités incroyables au niveau des régions », d’où le besoin d’un directeur national pour s’assurer notamment que la loi soit interprétée de la même façon partout au Québec.
Les premiers constats livrés hier par la commission Laurent font aussi état de familles et d’intervenants en détresse par manque de services de qualité d’un côté, et par manque de temps et par épuisement de l’autre.
Les Autochtones sont aussi surreprésentés à la DPJ, qui ne tient pas compte des enjeux culturels et de leurs valeurs.
La réforme Barrette de 2015, créant les centres intégrés (et universitaires) de santé et de services sociaux (CISSS et CIUSSS), a aussi fragilisé les services à la jeunesse, les noyant « sous une cascade de décideurs ».
Mais surtout, la commission spéciale rappelle que les décisions de la DPJ devraient toujours prendre en compte d’abord l’intérêt de l’enfant, ce qui n’est pas toujours le cas.
« La parole des enfants doit être sollicitée, écoutée et protégée », a soutenu Mme Laurent, disant avoir entendu « tellement d’exemples où la voix, la volonté et les droits [de l’enfant] ne sont pas respectés » lors des audiences.
« BAROUETTER LES ENFANTS »
Elle a souligné que la commission avait aussi écouté des experts pressant la DPJ d’« arrêter de barouetter les enfants et de faire des essais et erreurs avec la famille d’origine », par exemple.
La recommandation d’instaurer rapidement un directeur national à la DPJ a été bien reçue par les syndicats d’employés et la Fédération des familles d’accueil et ressources intermédiaires.
« Oui, ça pourrait aider, mais ce ne sera pas suffisant », indique d’emblée Jeff Begley, président de la Fédération de la santé et des services sociaux (FSSS-CSN).
Il réclame d’abord et avant tout la sortie des services à la jeunesse des CISSS et CIUSSS, surtout axés sur la santé, selon lui.
DIRECTEUR DE L’EXTERNE
Le psychologue et ancien employé de la DPJ, Paul Langevin, espère quant à lui que ce poste sera pourvu par quelqu’un provenant de l’extérieur de l’organisation.
« Sinon, ça ne marchera pas », dit-il, si un responsable déjà en place est nommé, recréant selon lui les mêmes failles.
Pour sa part, le ministre délégué à la Santé et aux Services sociaux, Lionel Carmant, a dit accueillir avec intérêt les constats de la commission, promettant de les analyser en profondeur pour améliorer les services.