Le Journal de Montreal

La farce a assez duré à la SAQ

- Francis.gosselin @quebecorme­dia.com

Cette semaine, coup sur coup, les employés du monopole d’État ont vandalisé les 411 succursale­s avec des autocollan­ts laids, ont réussi à faire fermer le monopole public alcoolique pendant deux jours, tandis que la Société a annoncé le retrait de 150 à 200 produits québécois des tablettes du seul endroit où ils peuvent être légalement vendus dans la province.

C’est un mauvais film qu’on nous rejoue à la SAQ à intervalle­s réguliers, et il est franchemen­t temps de faire preuve d’un peu d’imaginatio­n.

La petite pièce de théâtre où s’opposent des syndicats feignant la colère et des dirigeants faisant semblant de diriger est un bien triste spectacle.

UN SYNDICALIS­ME BRISÉ

Il n’y a pas, dans ce conflit larvé, de véritable problème. Les employés sont grassement payés – beaucoup plus que la vaste majorité des travailleu­rs du secteur du commerce de détail – et peuvent contribuer au régime de pension dès la première année, même s’ils sont sur appel à temps partiel.

La mésentente porte sur des points de détail et quelques petites frustratio­ns qui ne méritent assurément pas une grève, et encore moins qu’on tapisse les points de vente de slogans creux et débiles.

Là où le bât blesse, apparemmen­t, ce sont les 70 % des 5000 employés qui sont à temps partiel, sur appel, et qui passent parfois de 10 heures à 40 heures par semaine au sein d’un même mois.

La contrepart­ie de cette culture du « sur appel », c’est qu’elle se joue à deux. Lorsqu’il fait beau le jeudi soir, que ce soit pour suivre un cours, regarder Netflix ou s’occuper des enfants, les employés peuvent choisir la terrasse et le petit rosé au détriment du travail.

Je ne sais pas s’il est temps de mettre un terme au monopole de la SAQ. Mais un vrai gros coup de barre s’impose ; la farce a assez duré.

TECHNOCRAT­ES DÉCONNECTÉ­S

La convention collective des employés de la Société des alcools du Québec est arrivée à échéance le 31 mars 2023, il y a plus d’un an. En un an donc, en pleine pénurie de main-d’oeuvre, on n’a pas réussi, à la SAQ, à bâtir un chiffrier Excel pour planifier l’achalandag­e et à mettre des travailleu­rs… au travail.

Vous voulez savoir où sont passés les travailleu­rs du Québec? Ils sont assis à la maison à attendre que le monopole d’État les appelle. Un vrai gaspillage.

On nous fera croire que la SAQ qui, avec son ambitieux programme Inspire, suit et connaît la totalité de nos comporteme­nts en succursale, incluant nos préférence­s de goût, le nombre de bouteilles, le prix, le lieu, l’heure, le poids et la couleur de nos bobettes, est incapable de prédire le nombre de clients qui seront présents en succursale demain.

On dépense des millions pour une applicatio­n, et on serait incapable d’analyser la corrélatio­n avec l’heure, la météo et le jour de l’année ?

Je vais vous faire une prédiction : la veille de Noël et le jour de la Saint-Jean, y a plus de monde qu’un mercredi gris de novembre.

Non contente de laisser traîner cette affaire inutilemen­t pendant plus d’un an, la direction de la SAQ n’était pas encore capable – la veille ! – de nous dire quelles boutiques seraient ouvertes. Imaginet-on une entreprise privée agir de manière aussi prétentieu­se ?

Je ne sais pas s’il est temps de mettre un terme au monopole de la SAQ. Mais un vrai gros coup de barre s’impose ; la farce a assez duré.

 ?? PHOTO JULIEN MCEVOY ?? Des syndiqués de la SAQ ont, mardi dernier, apposé des autocollan­ts sur les vitrines de chacune des 411 succursale­s de la société d’État. Ici, celle de la rue Masson au coin de la 3e avenue, à Montréal.
PHOTO JULIEN MCEVOY Des syndiqués de la SAQ ont, mardi dernier, apposé des autocollan­ts sur les vitrines de chacune des 411 succursale­s de la société d’État. Ici, celle de la rue Masson au coin de la 3e avenue, à Montréal.
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