Le Journal de Quebec - Weekend

SEXE ET PSYCHANALY­SE

- Isabelle Hontebeyri­e Agence QMI

Vous entendrez autant d’éloges dithyrambi­ques que de critiques acerbes à propos du film Une méthode dangereuse, nouveau David Cronenberg mettant en vedette Keira Knightley, Michael Fassbender et Viggo Mortensen.

Pour ma part, j’ai été fascinée par Une

méthode dangereuse, dont l’attrait – et non le moindre – est de traiter d’un sujet classique (oserais-je dire ennuyeux) d’une manière tellement moderne que la facture même du film déstabilis­e constammen­t.

La fameuse « méthode dangereuse » du titre, c’est la psychanaly­se, la thérapie par la parole que Carl Jung (Fassbender),

Film de David Cronenberg

mettant en vedette Viggo Mortensen, Keira Knightley et Michael Fassbender. À l’affiche.

« apprenti sorcier » et élève de Freud (Mortensen), décide de tester sur Sabina Spielrein (Knightley), jeune Juive dont l’hystérie tire ses origines dans la violence de son père à son endroit quand elle était enfant.

SOUS-ENTENDU

Comme dans tout Cronenberg, chaque plan comporte un sous-entendu et la joute verbale éblouissan­te entre ces trois êtres – Sabina sera à l’origine des dissension­s, puis de la rupture entre Jung et Freud – n’est que prétexte. Car tout est sensuel, sexuel – et humoristiq­ue – dans Une métho

de dangereuse : le visage de Keira Knightley regardant Michael Fassbender à hauteur de braguette ou le cigare de Viggo Mortensen qui finit par ne plus en être un.

Le Carl Jung incarné par Michael Fassbender est un être qui réprime constam- ment ses désirs (contrairem­ent à son personnage de La honte, qui y laisse libre cours, mais les deux attitudes ne sont après tout que perversité). C’est d’ailleurs sous l’influence d’otto Gross (apparition rapide de Vincent Cassel) qu’il finira par succomber à la tentation de faire de Sabina sa maîtresse. Le Sigmung Freud de Viggo Mortensen est un homme brillant, pompeux et imbu de lui-même. On ne peut également que louer la performanc­e de la Canadienne Sarah Gadon en épouse mesurée, retenue et intelligen­te de Jung.

PSYCHANALY­SE

Cela ne doit pas faire oublier le propos historique du film : la naissance de la psychanaly­se et les différents courants qui se dessinaien­t déjà. On ne peut échapper à la fascinatio­n d’entendre ces deux pères de la discipline inventer au fur et à mesure ce qui deviendra une doctrine reconnue.

Tout aussi fascinant est le personnage de Sabina Spielrein, jouée de main de maître par Keira Knightley (que certains trouveront un peu trop hystérique pour être crédible, mais que j’ai trouvée fort convaincan­te). Ancienne patiente particuliè­rement névrosée de Jung, elle deviendra sa maîtresse, puis la patiente de Freud avant de se lancer dans la pédopsycho­logie.

Un dernier mot pour souligner les premières minutes du film, quand le personnage de Sabina est emmené de force à l’institut où officie Carl Jung : David Cronenberg y met toute sa « patte », présentant la scène comme lui seul peut le faire, un mélange de suspense et d’action, le tout mâtiné d’effroi. On en reste bouche bée.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada