Le Journal de Quebec - Weekend

UN HOMMAGE ET UNE SALLE EN SON NOM

MONTRÉAL | Pionnier du cinéma québécois, Denys Arcand a maintenant une salle qui porte son nom, au cinéma Carrefour du Nord, à SaintJérôm­e.

- Maxime Demers MAXIME.DEMERS@JOURNALMTL.COM

« C’est un grand honneur d’avoir mon nom sur une salle de cinéma, mais encore plus sur une salle de cinéma commercial­e, a observé cette semaine le réputé cinéaste oscarisé il y a huit ans pour Les Invasions

barbares.

« Souvent, quand on nomme une salle, c’est dans des institutio­ns comme un Cégep ou à la Cinémathèq­ue où il y a d’ailleurs une salle Claude-jutra. Mais je ne connais pas de salle commercial­e qui porte le nom d’un cinéaste. Et je trouve cela particuliè­rement chaleureux parce que, ultimement, c’est le public qui décide de notre destin. Les critiques font un temps, ils aiment quelqu’un, puis changent pour un autre. Le public, au contraire, a de la mémoire. »

C’est Guy Gagnon, propriétai­re du cinéma Carrefour du Nord et ancien patron du distribute­ur Alliance Vivafilm, qui a eu l’idée de dédier une des salles fraîchemen­t rénovées de son cinéma à une personnali­té du cinéma québécois.

« Avec tout ce que Denys a apporté à notre cinéma, je n’ai pas eu à chercher longtemps avant d’arrêter mon choix sur lui, a expliqué M. Gagnon lors de l’inaugurati­on de la salle de 200 sièges, mardi.

Invité à prendre la parole, Denys Arcand a raconté une anecdote savoureuse à propos de son ami Guy Gagnon:

« Quand on est allés présenter le scénario des Invasions barbares à la SODEC, le fonctionna­ire nous a demandé : « pour- quoi financer ça?

« Guy Gagnon (qui travaillai­t alors chez Alliance Vivafilm) était à mes côtés. Il l’a regardé et lui a tout simplement répondu: “Parce qu’on va faire de l’argent!” Je me souviens encore de la réaction du fonctionna­ire de la SODEC qui était bouche bée. C’est donc grâce à la cupidité de Guy Gagnon que Les Invasions barbares ont pu voir le jour! »

LA MAGIE DU CINÉMA

Les salles de cinéma occupent bien entendu une place de choix dans le coeur de Denys Arcand. Le cinéaste dit y avoir vécu des moments magiques dans le passé, et continuer d’en vivre encore aujourd’hui. « J’étais en larmes à la fin du film Les

400 Coups de François Truffaut, raconte-til. L’un des derniers bons films que j’ai vus en salle, c’était Margin Call, un film américain merveilleu­x qui est un peu passé inaperçu. J’ai aussi vu récemment Pi

na de Wim Wenders qui est d’une beauté extraordin­aire. J’ai de belles découverte­s au cinéma à tous les six mois. »

À la demande d’une journalist­e, le cinéaste est aussi revenu sur quelques moments marquants de sa carrière et de sa vie en général. Ses plus grands accompliss­ements?

« C’est difficile à dire, a-t-il répondu. Il n’y a pas un moment plus important pour moi, mais il y a plein de moments formidable­s. Quand on a fait Jésus de Montréal et qu’on est allés à Cannes et qu’après la projection, on a vu la salle complète qui nous applaudiss­ait, on était soufflés. C’était la première fois que ça nous arrivait.

« Gagner l’oscar, c’était pas mal non plus! Sur le plan privé, il y a aussi ce moment ou Denise (Robert, sa productric­e et conjointe) est revenue de Chine en avion et qu’elle m’a mis un bébé dans les bras en me disant: c’est ta fille. J’avais pour la première fois un bébé dans mes bras, à 57 ans. »

« LE BON MÉTIER »

On lui a aussi demandé ce qu’il préférait dans le métier de cinéaste:

« J’aime les deux principale­s étapes de la réalisatio­n d’un film. J’aime autant écrire seul chez moi que diriger un plateau de tournage. J’ai le bon tempéramen­t pour mon métier. Je serais incapable de faire comme Michel Tremblay et de passer ma vie à écrire seul. En même temps, je serais incapable de juste réaliser des films écrits par d’autres et de toujours vivre dans le tourbillon de la réalisatio­n. Alors, pour moi, avoir les deux, c’est l’idéal. J’ai choisi le bon métier pour moi. »

Denys Arcand vient d’ailleurs de terminer l’écriture d’un nouveau film, une histoire d’amour (sa première) intitulée pour l’instant Deux nuits. Le scénario sera déposé sous peu aux institutio­ns.

« Je ne suis pas mégalomane. Mais j’ai souvent croisé des gens ces dernières années qui m’ont demandé si j’allais faire un nouveau film. C’est extraordin­airement touchant. Je me suis donc dit que j’allais laisser tomber l’idée d’écrire un roman et que j’allais plutôt faire un nouveau film. »

Principal ambassadeu­r du cinéma québécois à l’étranger depuis une trentaine d’années, le réalisateu­r de Jésus

de Montréal et du Déclin de l’empire américain s’est aussi réjoui de l’évolution de notre cinématogr­aphique locale.

« Mais quand on regarde tout le chemin parcouru par le cinéma québécois ces dernières années, on constate que c’est énorme. Quand j’ai commencé à L’ONF au début des années 1960, le cinéma québécois n’existait pratiqueme­nt pas. Si on regarde aujourd’hui, avec Monsieur Lazhar aux Oscar cette année et Incendies l’an passé, c’est absolument extraordin­aire. On est à des années-lumière de ce que c’était dans les années 1960. »

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DENYS ARCAND Plusieurs acteurs qui ont travaillé avec Denys Arcand au fil des années étaient présents à ses côtés pour l’inaugurati­on de la salle portant son nom.
 ??  ?? L’inaugurati­on a eu lien en présence de la ministre de la Culture et des Communicat­ions, Christine St-pierre.
L’inaugurati­on a eu lien en présence de la ministre de la Culture et des Communicat­ions, Christine St-pierre.
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