Le Journal de Quebec - Weekend
Au bon temps du muet
Le triomphe à Cannes et aux Oscars de L’Artiste, du Français Michel Hazanavicius, a redonné au cinéma muet le lustre qu’il avait un peu perdu auprès du grand public. Tandis que la Cinémathèque québécoise continue de le faire vivre à travers différentes rétrospectives (dont un volet Ciné-cirque les vendredi 13 et samedi 14 juillet avec des courts de Chaplin, Keaton, Laurel & Hardy, etc.), mediafilm.ca vous propose une incursion dans cet univers à travers un quintette de films qui parlent, un peu, beaucoup ou pas du tout.
BOULEVARD DU CRÉPUSCULE (1950)
Ce chef-d’oeuvre signé Billy Wilder ( Certains l’aiment chaud) s'inspire de l'expressionnisme pour créer le monde bizarre qui entoure Norma Desmond (Gloria Swanson), star déchue du cinéma muet, qui embauche un scénariste pour préparer son grand retour à l’écran. Un rythme vigoureux et une photographie remarquable mettent bien en valeur l'originalité de la fascinante intrigue, qui a d’ailleurs inspiré une comédie musicale d’Andrew Lloyd Webber. Comme pour rendre la tragédie encore plus halluci- nante, Gloria Swanson compose avec force un personnage qui rappelle sa propre expérience. Inoubliable.
HUGO (2011)
Arrivé sur les écrans presque en même temps que L’Artiste, dont il a été le principal et malheureux rival dans la course aux Oscars, Hugo est un hommage immensément mérité à l’inventeur du rêve au grand écran, le magicien Georges Méliès, par le très cinéphile Martin Scorsese. Cette oeuvre de beauté, de grâce et de nostalgie, qui tient à la fois de l'odyssée initiatique et du conte victorien, promène le spectateur dans un labyrinthe de références savantes et profanes, où il croise au passage le regard de Harold Lloyd et de Christopher Lee. Un classique instantané.
PALACE (1995)
Moins connu que les deux films précédents, cet exercice entièrement muet par le trio espagnol Tricycle évoque Chaplin et les frères Marx dans sa manière de raconter les mésaventures de trois frères écervelés qui font revivre le vieil hôtel décrépit dont ils ont hérité. Le résultat est un cocktail assez savoureux de slapstick, d'humour absurde, de burlesque, de fantaisie débridée et de vaudeville rocambolesque, où les auteurs font la part belle à un comique purement visuel et très physique, comme au bon vieux temps du cinéma muet. Une curiosité.
LES PORTES TOURNANTES (1988)
À partir de documents adressés à son père, un jeune garçon revit l'histoire de sa grand-mère, une ancienne pianiste du cinéma muet, dans cette oeuvre sensible et habile inspirée du roman de Jacques Savoie. Ultime long métrage du grand Francis Mankiewicz ( Le Temps d’une chasse, Les Bons Débarras), disparu trop tôt, le film rend à la fois hommage au cinéma des premiers temps et à la muse du réalisateur, sa compagne Monique Spaziani. À redécouvrir.
ZELIG (1983)
Woody Allen a créé ce brillant faux documentaire, composé (comme il se doit) de fausses archives muettes datant des années 1920, dans lesquelles il apparaît sous les traits de Leonard Zelig, un homme possédant la faculté de se transformer mentalement et physiquement pour ressembler aux individus qu'il côtoie. Sur le plan technique, le résultat est une réussite exceptionnelle, qui profite de l'humour particulier de son auteur tant dans la création du personnage que dans l'évocation du contexte. Un vrai bijou.