Le Journal de Quebec - Weekend

LA TECHNOLOGI­E AU SERVICE DE LA TRADITION

C’est dans une petite ville non loin de Portland, en Oregon, que se trouvent les studios de Laika, la compagnie qui nous a donné Coraline et qui s’apprête à nous présenter son dernier-né, Paranorman.

- Isabelle Hontebeyri­e Agence QMI

De l’extérieur, le bâtiment anonyme, n’a rien d’exceptionn­el. Mais une fois à l’intérieur, c’est une véritable caverne d’Ali Baba qui vous marque à jamais ! En effet, réaliser un film d’animation en image par image ( stop motion) demande une patience et un souci du détail qu’on ne trouve nulle part ailleurs.

Le Norman du titre est un petit garçon bien particulie­r : il voit les morts (ça nous rappelle le fameux « I see dead peo

ple » du Sixième sens) et peut communique­r avec eux. Du coup, quand sa petite bourgade est envahie par des zombies et autres morts-vivants, c’est lui qu’on appelle à la rescousse.

UNE IMPRIMANTE EN 3D...

Pour raconter ses aventures, pas moins de 320 personnes ont oeuvré d’arrache-pied pendant 20 mois. Chris Butler dit avoir « mis 10 ans à en écrire le scénario ». « C’est un film de zombies pour enfants, un mélange de John Carpenter et de John Hughes », a-t-il ajouté.

Contrairem­ent à un plateau de film normal, celui de ParaNorman comprend de nombreux ateliers de fabricatio­n. Dans une pièce : les poupées/marionnett­es utilisées ainsi que les minuscules costumes des personnage­s. Autour d’un squelette en métal – sorte de mini-Terminator –, un enrobage de silicone. La tête de chaque poupée est animée et on y place différente­s expression­s faciales en fonction de ce qui se déroule. Dans une autre : la fabricatio­n, à la main, de tous les accessoire­s, des voitures aux boîtes à lettres en passant par des vélos ou même des canettes de boissons gazeuses. Près des plateaux – là où des animateurs tournent dans des décors de taille réduite – la fabricatio­n de toutes les plantes (arbres inclus) qu’on verra à l’écran.

La pièce la plus impression­nante est sans conteste celle qui abrite la merveille technologi­que : une imprimante 3D (officielle­ment un Rapid Prototy

pe). Avec ParaNorman, c’est la première fois que cet appareil – imaginé par les militaires américains et utilisé par la NASA pour produire des pièces détachées pour la navette spatiale – a servi pour un film d’animation.

L’intérêt ? « Cela nous permet de créer des expression­s qu’il serait impossible de faire à la main, faute de temps », a expliqué Brian McLean, responsabl­e du départemen­t RPP (Rapid Prototype Printing). En effet, chaque fois que Norman parle ou exprime une émotion (étonnement, peur, joie, etc.), une partie de son visage doit bouger. Imaginez un instant le nombre de combinaiso­ns possibles quand on a deux sourcils, deux yeux, un nez, une bouche et un menton. Bref, impossible de créer tous les visages manuelleme­nt.

Avec une imprimante comme celle-ci, il suffit de programmer les différente­s – et nombreuses – permutatio­ns. Des cartouches de résine (une espèce de silicone) vont ensuite imprimer les visages couche par couche. Le résultat laisse bouche bée. « Norman possède 8000 visages pour un total de 1,5 million d’expression­s faciales. » Plus qu’un humain!

MOTEUR

« Mais rien de tout cela ne sert à donner du réalisme, ce n’est pas ce que nous cherchons. Notre démarche en est une naturalist­e », a tenu à préciser Chris Butler. « ParaNorman est une comédie, un pastiche des films d’horreur et nous avons tenu à ce qu’il soit pour les enfants. Mais le sujet de l’intimidati­on est aussi abordé. »

C’est en arrivant sur les plateaux, les lieux où le film d’animation est physi- quement tourné, qu’on a l’impression de se retrouver dans Alice au pays des

merveilles, car tout est en miniature. À l’inverse d’un vrai plateau qui grouille d’activité, ici, les animateurs ont travaillé pendant près de deux ans, déplaçant marionnett­es et objets centimètre par centimètre. Histoire de vous donner une idée de l’ampleur de la tâche, sachez qu’en moyenne un animateur parvient à filmer entre trois et cinq secondes par semaine et que la scène des toilettes – dont on voit quelques secondes dans la bande-annonce – dans laquelle Norman voit le fantôme de Prendergha­st a mis un an à être tournée !

Et, au vu des 20 minutes que j’ai eu la chance de visionner au terme de ma visite de quatre heures, je dois vous dire que le tout est superbe. J’en suis encore bouche bée.

√ ParaNorman est présenté le 7 août en clôture du Festival internatio­nal de films Fantasia de Montréal. Le film d’animation prendra l’affiche le 17 août et la version québécoise est doublée par Émilien Néron, Alexis Plante, Catherine Brunet, Jean-Carl Boucher, Mitsou Gélinas et Éric Salvail.

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