Le Journal de Quebec - Weekend
JE N’AI PEUR DE RIEN - ANTOINE BERTRAND
Antoine Bertrand n’a peur de rien… ou presque. En entrevue, le comédien avoue redouter une chose: les séances photos.
Venant d’un acteur ayant déjà montré un bijou de famille dans Les Bougon, cette déclaration surprend. D’autant plus qu’Antoine Bertrand renvoie l’image d’un gars sûr de lui qui fonce, quel que soit le défi. Parodier Miley Cyrus à moitié nu sur une boule de démolition devant cinq millions de téléspectateurs au Bye Bye? Pourquoi pas. Camper une icône québécoise au cinéma dans Louis Cyr? Certainement. Envoyer des flèches aux invités des Enfants de la
télé pendant quatre ans? Assurément. Et pourtant, le touche-à-tout admet perdre ses moyens devant un appareil photo. Du moins après avoir épuisé son répertoire habituel de poses clichées.
«Je n’ai jamais été full à l’aise devant un kodak, déclare-t-il. Surtout quand on me dit: “Fais quelque chose de fou!” C’est comme me dire: “Sois drôle! Maintenant!” C’est trop de pression! Être mannequin, ce n’est pas mon métier. Quand mes trois faces sont sorties, c’est fini. Si tu veux quelque chose de loufoque après ça, je ne suis peut-être pas ton homme.»
POLITIQUEMENT INCORRECT
Rencontré au Théâtre du Rideau-Vert, entre deux répétitions des Intouchables, cette adaptation théâtrale du célèbre film français, dont la première aura lieu cette semaine à Montréal, Antoine Bertrand répond à chaque question avec franchise, quitte à déroger au politiquement correct. Un exemple? Il résume en trois mots judicieusement choisis son conseil aux critiques du cinéma québécois qui scrutent ses (contre-) performances au box-office: «Crissez-y patience.» Bien noté. Antoine Bertrand craint-il que son manque de filtre lui attire un jour des problèmes? Non. «Il faut prendre des chances dans la vie, répond-il. Tout est tellement lisse, astheure. »
Chose certaine, cette propension à dire tout haut ce que plusieurs pensent tout bas sert bien sa carrière. Au cours des dernières années, sa cote de popularité n’a fait que grimper. «Je sens qu’on m’apprécie pour mes talents d’acteur, mais aussi pour ma personnalité, dit-il. C’est l’fun.»
D’aussi loin qu’on se souvienne, Antoine Bertrand n’a jamais eu la langue dans sa poche. Mais l’acteur de 37 ans insiste: dans un passé éloigné, il a déjà fait preuve de timidité.
«Très jeune, j’étais quelqu’un de plus gêné. J’étais plus dans ma bulle. Je jouais avec mes tout seul dans mon coin.»
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POINTS COMMUNS
Antoine Bertrand trace un parallèle intéressant entre sa propre personnalité et celle de Louis, son personnage dans Intou
chables. Le comédien dit beaucoup ressembler au bum insolent, irrévérencieux et sans concession qui nouera une relation d’amitié avec Philippe, ce riche homme d’affaires devenu tétraplégique, campé par Luc Guérin.
«Nos types d’humour sont très semblables, souligne-t-il. Louis est très cabotin. Il parle sans complaisance. Il traite tout le monde égal. Que tu sois en chaise roulante ou que tu sois un marathonien, il n’épargne personne. Je me reconnais dans son côté insolent. Comme moi, il aime trouver le bobo et piocher dedans. Et comme moi, il est capable de faire tout ça en restant sympathique!»
Bien qu’il ait plusieurs points en commun avec son nouvel alter ego, Antoine Bertrand a trimé dur pour s’approprier le rôle popularisé par Omar Sy au grand écran. Depuis plusieurs mois, il enchaîne lectures et répétitions avec René-Richard Cyr, le metteur en scène des Intouchables québécois.
«Répéter au théâtre, c’est du gros travail, note le comédien. Heureusement, je n’ai pas pogné de mur. Je n’ai pas encore pogné mon Waterloo. C’est ce qui arrive quand tu es bien dirigé, que tu as de bons partenaires et que ton rôle te convient.»
Tandis que Luc Guérin arrive une heure avant chaque séance pour apprivoiser son fauteuil roulant, Antoine Bertrand doit surmonter un autre type de défi: éviter de rire en récitant ses répliques, adaptées au Québec par Emmanuel Reichenbach. «Le texte est tellement savoureux, dit l’acteur Bertrand. Ça tombe en plein dans mes cordes.»