Le Journal de Quebec - Weekend
L’HOMME DERRIÈRE
LE MILITANT
Pierre Falardeau était «un grand gaillard solide, mais aussi sensible que tout le monde», rappelle sa compagne Manon Leriche.
Une biographie écrite à plusieurs mains: c’est ainsi que Manon Leriche, la compagne du regretté Pierre Falardeau, aime décrire le livre Lève la tête, mon frère!, dans lequel une quarantaine de proches, amis ou connaissances du cinéaste prennent la plume pour lui rendre hommage.
Cet ouvrage de 200 pages dirigé par Manon Leriche et Pierre-Luc Bégin (un ami de Falardeau) regroupe des témoignages d’amour et de sympathie écrits par des gens qui ont connu de près ou de loin le cinéaste militant et d’autres qui ont suivi son travail. La plupart des textes ont été écrits dans les jours qui ont suivi sa mort, le 25 septembre 2009. Mais le livre comprend également des témoignages plus récents et même des lettres que Falardeau a reçues de son vivant.
«Quand je lis les hommages après le décès d’une personne connue, je trouve souvent que ça finit par se recouper», souligne la conjointe de Falardeau, Manon Leriche, en entrevue au Journal.
«Jai donc voulu réunir une sélection d’hommages qui pourraient donner un bon portrait d’ensemble sur l’homme et l’artiste qu’était Pierre. Les gens me demandaient depuis longtemps: à quand une biographie sur Pierre? Ce n’était pas l’idée de ce livre, mais au final, je trouve que ça donne une sorte de biographie écrite à plusieurs mains.»
La liste de personnalités qui rendent hommage à Falardeau dans le livre est aussi variée que surprenante. On y retrouve autant des politiciens (dont Bernard Landry) et des libres penseurs et des amis et complices de Falardeau (Luc Picard, Julien Poulin).
LE PHÉNOMÈNE GRATTON
Le livre comprend également deux textes du journaliste de cinéma Georges Privet qui analysent l’oeuvre de Falardeau en soulignant notamment l’importance de la série de films Elvis
Gratton, qui ont généralement été massacrés par la critique. «Pour Pierre, les comédies Elvis Grat
ton étaient des films aussi importants que ses drames engagés ( Octobre,
15 février 1839), mais pas de la même façon, note Manon Leriche. Gratton était affreux, mais c’était voulu ainsi, pour provoquer. Mais le personnage lui a échappé parce que le public l’a adopté. Pierre voulait que les gens détestent Gratton, mais les gens se sont mis à l’aimer.» La famille proche du cinéaste a aussi participé au recueil. Ses fils Jules et Jérémie signent des mots touchants, tout comme Manon Leriche.
«Ç’a été difficile à écrire, d’autant plus que je l’ai fait assez tôt dans mon processus de deuil, admet-elle. J’ai dû aussi prendre mon courage à deux mains pour faire le tour de ma boîte aux lettres. Il faut savoir que Pierre n’avait pas de courriel et n’écrivait pas sur un ordinateur. Après sa mort, j’ai donc reçu beaucoup de lettres par la poste.»
La plupart des gens se souviennent de Falardeau pour ses coups de gueule et ses prises de position radicales. Mais le livre nous permet de découvrir l’homme doux et timide qui se cachait derrière le cinéaste militant et polémiste.
«C’était un grand gaillard solide, mais aussi sensible que tout le monde, rappelle sa compagne. Il a toujours été un combattant et il a trouvé ça dur par moments. (...) Je crois que les gens s’ennuient de cela parce qu’il n’y a plus de voix dissidente qui s’élève comme lui le faisait.» Le livre Lève la tête, mon frère!, publié aux Éditions du Québécois.