Le Journal de Quebec - Weekend
SUR LES TRACES DES ROMAINS
Jamais les légionnaires romains qui ont construit le mur d’Hadrien n’auraient pu s’imaginer que, près de 2000 ans plus tard, 15 000 marcheurs parcourraient chaque année les 135 km à l’ombre de ses vestiges, tout en jouissant des charmes irrésistibles de l
Le mur d’Hadrien, site du patrimoine mondial de l’UNESCO, est aujourd’hui la plus importante attraction touristique du nord de l’Angleterre.
Le circuit de longue randonnée se situe au sud de la frontière de l’Écosse et s’étire du village de Bowness, à l’ouest, jusqu’à la magnifique ville de Newcastle upon Tyne, à l’est. Entre les deux: d’abord la très agréable ville de Carlisle, suivie des horizons bucoliques à fendre l’âme, pâturages verdoyants, fermes ancestrales et villages paisibles, moutons de multiples espèces et bovins impassibles.
Puis, au centre du parcours, le parc national Northumberland, où les vestiges des murailles romaines sont les plus présents et où le terrain plat se transforme en une succession de collines.
En finale, une immersion urbaine le long de la rivière Tyne, jusqu’au coeur de la trépidante cité de Newcastle.
UN SENTIER HISTORIQUE
Le sentier épouse en grande partie le tracé et les vestiges de l’imposante fortification romaine de 5 m de hauteur initialement, érigée en six ans entre l’an 122 et 127 de notre ère. Un mur doté de 300 tours et de plusieurs forts qui traçaient alors la frontière entre les Barbares et la Bretagne.
L’Empire romain, à ce moment-là, comprenait la totalité du pourtour de la Méditerranée, une large partie de l’Europe (à l’exception du village d’Astérix), ainsi que du Royaume-Uni actuel. En élevant ce rempart, l’empereur Hadrien établissait les limites de l’expansion de l’empire en instaurant une ère de stabilité et de paix.
DÉPART DE CARLISLE
Étant arrivé sur le vol d’Air Transat Montréal-Glasgow, on profite d’abord de quelques jours pour visiter la plus importante ville d’Écosse avant de nous diriger vers Carlisle, à une heure de train de là. Nous avons décidé d’y démarrer la marche d’ouest en est, contrairement à la très grande majorité des randonneurs qui vont dans le sens contraire. Selon l’auteur de Walking Hadrian’s Wall Path, Mark Richards, «c’est le meilleur choix pour profiter des vents dominants et de l’ensoleillement».
Une journée s’impose pour la visite de Carlisle, dont la vieille ville entourée de fortifications jouit d’un charme fou avec son musée, sa magnifique cathédrale et un fort imposant, construit au 11e siècle, qui a joué un rôle majeur dans le conflit entre les Jacobites et les Anglais au 18e siècle. Un épisode que connaissent ceux et celles qui ont suivi la série Outlander.
SENTIER DU MUR D’HADRIEN
Dès qu’on rejoint le sentier, au long de la rivière Eden, on baigne dans un environnement naturel extraordinaire, traversant les prés parmi les animaux. Au Royaume-Uni, les agriculteurs permettent aux marcheurs de passer au milieu de leurs champs et de leurs troupeaux, parfois même dans la cour de leurs bâtiments. Chacune des nombreuses clôtures est dotée d’une barrière qu’on doit ouvrir
et refermer consciencieusement ou de marches pour les enjamber.
Dans son premier tiers, le sentier défile en terrain plat. Le second tiers s’avère le plus spectaculaire puisqu’il suit vraiment le mur dans un enchaînement incessant de grimpes et de descentes ainsi que de points de vue époustouflants. Au-dessus de la pierre qui serpente s’étale l’incarnation vivante du bucolique. Vision pastorale à son paroxysme. La topographie du dernier tiers revient au plat de la vallée en longeant la rivière Tyne et en s’introduisant dans la ville.
Selon l’archéologue Bruce Bennison: «L’intérêt premier du mur d’Hadrien demeure avant tout historique et se révèle au fil des musées dont chacun aborde un aspect spécifique de la culture romaine, des techniques de construction et de la vie quotidienne de ceux et celles qui vivaient sur le mur. Particulièrement dans les forts […], dont le plus fascinant reste celui de Vindolanda.»
Le principal grand défi des marcheurs consiste à éviter de mettre les pieds dans les bouses de vache et le crottin de mouton qui recouvrent les pâturages. L’autre problème, c’est l’omniprésence de l’ortie, une plante qui n’a l’air de rien, mais qui donne l’impression de vous planter des aiguilles dans la chair au simple contact.