«ON AIME MIEUX SAUVER UNE VIE QUE VENDRE 100 000 ALBUMS»

Forcément, vingt ans de carrière, ça forge un bon legs musical. Mais quand les gars de Taktika jettent un regard derrière, ce ne sont pas les chansons et les concerts qui les rendent fiers mais plutôt l’impact que leur hip-hop a eu sur leurs fans.

C’est une anecdote qu’ils racontent souvent mais qui, aux yeux de Simon Valiquette et Fred Auger, alias B-Ice et T-mo, illustre parfaitement ce qui les motive à véhiculer des valeurs positives dans leurs chansons. C’était en 2015, lorsque le vidéoclip de la chanson Résilient, a été placé sur YouTube.

«Le jour même, dans les commentaires, quelqu’un a écrit qu’il allait se suicider et qu’après avoir vu le vidéoclip, il a choisi d’attendre», relate avec émotion B-Ice.

Pour les deux rappeurs de la rive sud de Québec, qui savent de quoi ils parlent puisque leur ami et proche collaborateur Manu Boivin s’est enlevé la vie quelques jours après avoir enregistré une pièce de Taktika en 2015, ce genre de témoignage vaut de l’or.

«On aime mieux sauver une vie que de vendre 100 000 albums», martèle T-mo.

UNE DEUXIÈME VIE

Les messages dans les chansons de Taktika n’ont pas toujours été aussi positifs par contre. À leurs débuts, les paroles de leurs chansons célébraient plutôt un mode de vie typique du gangsta rap américain axé sur la consommation d’alcool et de drogue.

Les choses ont changé avec la paternité et surtout la décision de B-Ice de devenir sobre, il y a bientôt dix ans. Du coup, plusieurs chansons, comme Mon mic, mon forty, mon

blunt et ses références à la débauche, ne collaient plus à leur réalité et ça devenait intenable pour les deux artistes de les chanter. Or, ces succès de la première heure demeurent des favoris des fans. Comment concilier le tout?

«En spectacle, Fred faisait son bout de texte mais moi, je ne faisais pas le mien et on plaçait ces chansons avant la pièce Désintox, ce qui nous amenait à parler de ce sujet. Par contre, sur l’album de notre 20e anniversaire, je fais intégralement le texte de Mon mic..., mais au passé», dit B-Ice. «Ça donne une deuxième vie à cette chanson qui est davantage alignée avec ce que nous sommes aujourd’hui», ajoute T-mo.

LE BERCEAU DU HIP-HOP À LÉVIS

Pour souligner leurs 20 ans, les gars de Taktika se sont mis en mode nostalgie avec

Le Journal. Le rendez-vous pour la prise de photos et l’entrevue avait été donné au Centre communautaire Paul-Bouillé, dans le secteur de Charny, à Lévis, là où B-Ice et Tmo se sont produits à de multiples reprises devant des salles combles dans les premières années de Taktika.

De nombreux autres artistes locaux ont joué dans cette salle, qui est en quelque sorte le berceau du hip-hop sur la rive sud.

«Il y a eu de gros shows ici. Les gens arrivaient tôt pour faire la file, vers 18 h, et ce n’est pas tout le monde qui pouvait rentrer. À cette époque, on ne se souciait pas vraiment de la limite permise par la loi», se souvient B-Ice. L’album 20e anniversaire de Taktika est en vente depuis le mois de décembre.