Le Journal de Quebec - Weekend
UN FILM UN PEU LOURD
Maudite poutine, premier long métrage de Karl Lemieux, est assuré de s’attirer, soit des éloges, soit des critiques, tant il ne laissera personne indifférent.
En ne cherchant pas à plaire, cette proposition est courageuse et ambitieuse. Car la forme l’emporte vite sur le fond, l’intrigue étant d’une minceur peu commune.
En région, Vincent (Jean-Simon Leduc), un jeune batteur dans un groupe de hard rock, a maille à partir avec les Motards, puisque lui et les autres membres de la formation ont volé de la marijuana aux criminels. À l’occasion d’un tabassage en règle effectué par les criminels en guise d’avertissement et de motivation à les rembourser, Vincent croise Michel (Martin Dubreuil), son frère, qu’il n’avait pas vu depuis des années. Personnage à la dérive, drogué, Michel est vaguement acoquiné avec les Motards et se retrouve donc au milieu de cette querelle qui tourne mal.
Filmé en noir et blanc – ce qui accentue la violence de certaines scènes – et en 16 mm – la direction de la photographie, assurée par Mathieu Laverdière, est à souligner –, Maudite poutine comprend des scènes d’une beauté saisissante. Qu’il s’agisse de l’intérieur d’une usine, de la destruction du mobilier d’une pièce ou de plusieurs scènes en extérieur (le jardin de Michel par exemple), le cinéphile ne manquera pas d’être impressionné.
Le cinéaste fait également la part belle à la musique, qui accompagne bon nombre de moments de ce long métrage de 96 mi- nutes, soulignant l’intensité dramatique de scènes importantes.
Mais trop de moments s’éternisent, comme si Karl Lemieux voulait examiner certains aspects des personnages. L’effet est raté et on se prend à souhaiter à maintes reprises que le rythme de ce Maudite poutine s’accélère.
Assurément à classer parmi les films d’auteur, Maudite poutine a d’ailleurs été présenté dans la section «Horizons» à la Mostra de Venise, ce qui confirme bien ce que le long métrage peut avoir d’innovateur, de surprenant et d’intrigant. Mais cela suffit-il?