Le Journal de Quebec - Weekend

TROIS ÎLES POUR PLONGER DANS LE FLEUVE

Quand on ne vit pas à ses côtés, on oublie parfois toute la beauté de ce fleuve qui traverse la province et qui accueille des paysages, une flore et une faune uniques. Trois jours suffisent pourtant pour (re) plonger dans cette atmosphère fluviale propre

- VÉRONIQUE LEDUC

« Sans le fleuve Saint-Laurent, le Québec se serait développé bien autrement », rappelle à ses quelques passagers le capitaine Jean-Pierre Rioux pendant une sortie d’observatio­n de loupsmarin­s, près de Trois-Pistoles, avant d’ajouter que l’on trouve dans ce cours d’eau 25 % de l’eau douce de toute la planète. « Nous avons une richesse incroyable de laquelle il faut prendre soin ! »

Voilà qui met la table pour les jours à venir.

L’ÎLE HISTORIQUE

Quelques minutes plus tard, son beau navire bleu nous dépose sur l’île aux Basques, un endroit dont l’histoire témoigne d’une autre richesse du fleuve : sa faune. « Ici, nous trouvons des phoques, des poissons, des palourdes, des crevettes, des bélugas… Tout ce qu’il y a dans l’océan, quoi ! C’est pour ça que nous sommes fiers de parler de “mer” pour désigner cette partie qui est en fait un estuaire maritime composé d’un mélange d’eau douce et salée. »

Il y a plus de 400 ans, ce sont plutôt les baleines qui intéressai­ent les pêcheurs basques qui faisaient fondre leur gras pour vendre en Europe l’huile qui en résultait et qui servait à l’éclairage. Aujourd’hui, plusieurs vacanciers débarquero­nt d’ailleurs sur l’île aux Basques pour faire la visite guidée qui les mènera jusqu’aux fours, dont on se servait à l’époque.

Si on veut étirer le séjour sur cette île reconnue comme un des premiers lieux canadiens de contact entre Européens et Amérindien­s, on choisira de passer la nuit dans l’un des trois chalets rustiques qui offrent un confort minimal, mais une vue grandiose sur le fleuve, les montagnes de Charlevoix d’un côté et les vallées de Trois-Pistoles de l’autre.

Fait rare à notre époque : ici, ce n’est pas l’humain qui décide des horaires, mais la nature. Dans la région, les marées ouvrent ou ferment le chemin entre la côte et les îles. Ce n’est donc qu’en milieu d’après-midi, le lendemain, que l’eau est en quantité suffisante pour nous permettre de revenir sur la terre ferme à bord du bateau du capitaine Rioux.

L’ÎLE HABITÉE

Après avoir fait la route entre Trois-Pistoles et la municipali­té de L’Isle-Verte, il faut prendre le traversier avant que l’eau ne se retire de nouveau, direction l’île Verte cette fois, non loin de la côte. Là, entre les maisons éparpillée­s au vent, les fumoirs au bois usé et les habitants qui racontent qu’ils doivent prendre l’hélicoptèr­e pour faire les courses en hiver, on a l’impression d’être propulsé dans une autre époque.

C’est à bord d’une navette électrique que Guy Langelier, tombé en amour avec l’île il y a plusieurs années, propose de faire découvrir la moins peuplée des municipali­tés québécoise­s. Sur 13 kilomètres de long et deux kilomètres de large vivent 200 habitants en été et une vingtaine seulement en hiver. Le circuit comprend des arrêts aux trois principaux attraits de l’île, soit l’émouvant phare rouge et blanc qui date de 1809, l’impression­nant Musée du squelette, prétexte à apprendre 1001 faits surprenant­s, puis l’exposition de l’École Michaud qui porte sur la vie insulaire.

S’il n’y a que deux restaurant­s et le sympathiqu­e café d’Alphé sur l’île, le choix d’hébergemen­t est plus varié. On loue une maison si on est en famille, on s’arrête par exemple au gîte Aux trois couettes pour une ambiance digne du bord de mer ou on choisit l’auberge Les Maisons du Phare si on veut côtoyer l’histoire. Dans tous les cas, les paysages sont au rendez-vous.

L’ÎLE ÉCOLOGIQUE

Quelques heures plus tard, après avoir retrouvé le continent, fait la route entre L’Isle-Verte et Rivièredu-Loup et pris le bateau pendant une trentaine de minutes, nous voilà cette fois sur le quai de l’île aux Lièvres.

« Ici, vous faites plus que du tourisme, vous faites de l’écotourism­e », explique d’emblée la guide aux passagers venus passer la nuit. C’est que, sur l’île aux Lièvres, la Société Duvetnor n’a pas perdu de vue la mission qu’elle s’est donnée il y a près de 40 ans, soit celle de protéger les îles du Bas-Saint-Laurent.

Ici donc, on se sert de l’énergie solaire et de l’eau du ruisseau traitée sur place et on sensibilis­e les visiteurs à leur environnem­ent. Mais l’endroit est la preuve que la nature peut aller de pair avec confort. Les neuf chambres de l’Auberge du Lièvre et les quatre chalets de l’île sont modernes et épurés, et la salle à manger propose des tables d’hôte succulente­s. Pour ceux qui le voudraient, plusieurs sites de camping sont disponible­s.

Le lendemain, impossible de partir avant de faire une des randonnées offertes sur les 40 kilomètres de sentiers balisés. Les vues sont splendides, les grèves sont désertes et les rencontres avec les oiseaux et les phoques sont quasi assurées. Après tout, nous sommes dans une réserve de biodiversi­té !

En attendant le bateau qui nous ramènera sur la côte, nous visitons la petite exposition qui parle de l’histoire de l’île qui, déjà au début du siècle dernier, accueillai­t chaque dimanche des visiteurs de la région. À cette époque apprend-on, on voyageait localement bien plus qu’à l’internatio­nal.

Et franchemen­t, ces trois jours au milieu de l’eau nous donnent envie de faire de même encore et encore.

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Plus de 200 ans après sa constructi­on, le phare de l’Île Verte continue d’éclairer la région.

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