Le Journal de Quebec - Weekend
LE CINÉMA POUR REJOINDRE UN LARGE PUBLIC
Dans La ferme et son état, de jeunes agriculteurs remettent en question un système qui, dénoncent-ils, favorise les grandes industries. Ils ont trouvé un allié en Marc Séguin. Peintre, écrivain mais aussi lui-même fermier, il a décidé d’utiliser l’arme du
Il y a longtemps que vous voulez tourner un documentaire sur ce sujet ?
Non, c’est un truc qui s’est fait spontanément. Je n’avais jamais pensé faire un film là-dessus, mais c’est un sujet pour lequel j’ai beaucoup d’affection. Je connais plein de gens qui font des choses, quelqu’un qui vend de l’ail, un autre qui vend du poulet, et à force de parler avec eux, je me rends compte qu’ils ont beaucoup de difficulté à exister dans le système actuel qui favorise l’agriculture industrielle. Pourtant, il y a une nouvelle génération sur les fermes, avec de nouveaux projets qu’ils veulent mener à terme, mais c’est bloqué.
Pourquoi le cinéma était-il le bon médium pour traiter ce sujet ?
Je sens que ça commence à préoccuper les gens et je me suis demandé quel organe en parlerait le mieux. J’ai des amis qui prêchent des convertis. Je pense que le cinéma peut rejoindre un large public. Si je peux garder quelqu’un captif pendant deux heures, je vais pouvoir lui envoyer le plus d’informations possible. Et mon intérêt va plus loin. Nous sommes fiers d’être québécois, mais plus ça va, moins on produit notre bouffe. Ça devrait être notre identité, mais nous sommes en train de la perdre. C’est grave parce que c’est au profit de grandes filiales qui ne sont pas nécessairement d’ici.
Quel impact espérez-vous que notre film aura ?
Je souhaite que la population soit informée, qu’elle comprenne quel est l’état de l’agriculture en ce moment au Québec. L’État fait des choses, mais pas assez. Une des choses à faire serait de réorienter les subventions. Au lieu qu’elles aillent à des industries qui fonctionnent relativement bien comme l’élevage de porc, de poulet ou l’industrie laitière, pourquoi ne pas l’orienter vers ces projets de démarrage d’entreprises qui viennent de gens qui pensent différemment et le font de manière plus écologique et responsable ?
Qu’est-ce qui nous guette si rien ne change ?
Deux choses. Premièrement, plein de pays et de provinces canadiennes sont en avance dans le développement de l’agriculture à taille humaine, ce qui signifie que pour les rattraper, il faudra travailler deux fois plus fort. Puis je pense qu’on va devenir de plus en plus dépendants des importations, ce qui nous met à la merci de la fluctuation de la monnaie.
Que retenez-vous de votre expérience comme réalisateur de documentaire ?
Ce que j’ai trouvé de plus beau, ce sont les gens que j’ai rencontrés et qui tiennent l’agriculture à bout de bras. J’aurais pu chialer et cacher une caméra dans les abattoirs pour être plus spectaculaire. Mais on a fait le pari très tôt de montrer de belles choses. Le documentaire La ferme et son état prend l’affiche le 29 septembre.