Le Journal de Quebec - Weekend

FÉLIX À LA FAÇON DE FRANCIS

Longtemps, Francis Leclerc a résisté. Mais quand la quarantain­e a sonné, il n’a pu que constater l’évidence : il lui fallait tourner un film à partir des écrits de son père, le grand Félix Leclerc. Pour se faire plaisir, et aussi pour faire plaisir à ses

- CÉDRIC BÉLANGER Le Journal de Québec Pieds nus dans l’aube prend l’affiche vendredi.

Cette page dont parle Francis Leclerc, elle s’intitule Pieds nus dans l’aube, un touchant long métrage qui détaille une année charnière dans l’enfance de Félix, tel que l’avait racontée le poète de l’île d’Orléans dans son roman paru en 1946.

Dans le film, co-scénarisé par Leclerc et Fred Pellerin, on retrouve le jeune Félix à La Tuque, à l’âge de 12 ans, tout juste avant de partir étudier à Ottawa, à son corps défendant. Il coule des jours heureux avec sa famille, en particulie­r avec son père joué par Roy Dupuis, et son grand ami Fidor, dont l’existence n’a jamais été démontrée hors de tout doute.

« C’est sûr que c’est mon film le plus personnel. Il y a beaucoup de moi dedans. Beaucoup de mon fils aussi », analyse Francis Leclerc, en parlant de son garçon de 16 ans, l’âge qu’il avait quand son père est décédé le 8 août 1988.

REVISITER L’OEUVRE DE SON PÈRE

Découvert au cinéma grâce aux longs métrages Mémoires affectives (gagnant de quatre Jutra et trois Genie en 2005) et Un été sans point ni coup

sûr, également réalisateu­r à la télévision, notamment dans les séries

Apparences et Les beaux malaises, Francis Leclerc souhaitait depuis vingt ans revisiter l’oeuvre de son père.

Sauf que dans la jeune vingtaine, il estimait manquer d’expérience pour entreprend­re un projet aussi intime.

PAS DE BIOGRAPHIE

« Je ne voulais pas me servir de mon père, je me suis battu contre ça toute ma vie. » Mais il a changé son fusil d’épaule à 40 ans. Il était le temps de « rouvrir quelque chose ».

« Je ne voulais pas faire sa vie. De toute façon, elle avait déjà été faite, et ça n’avait pas été heureux », dit-il en référence à la controvers­ée minisérie Félix

Leclerc, en 2005. « J’ai décidé de me faire plaisir. Je suis allé chercher l’oeuvre qui me parle le plus et je l’ai mis en film. C’est un roman dans lequel il y a des moments heureux, des tristesses, des séparation­s. J’avais le goût d’un beau film, sans pour autant lui rendre hommage. »

LA VOIX DE FÉLIX

En adaptant Pieds nus dans l’aube, Francis Leclerc ne souhaitait donc pas faire un film spécifique­ment sur Félix. C’est d’ailleurs pourquoi le garçon (interprété par Justin Leyrolles-Bouchard) ne se fait appeler qu’une seule fois Félix Leclerc dans le film. Par contre, le réalisateu­r a fini par accepter d’inclure un enregistre­ment de la voix de son père qui fait une lecture de quelques paragraphe­s de son livre. Entendre cette voix d’outre-tombe constitue un des moments les plus émouvants du film. « C’est ma monteuse qui a eu l’idée. Je suis au courant de l’enregistre­ment depuis des années, mais, avec Fred, nous avons fait le choix délibéré de ne pas s’en servir. Il fallait que le film se tienne tout seul. Je ne voulais pas que ce soit une béquille. La monteuse me l’a quand même demandé. Elle a pris un segment et l’a mis là où ça fait mal. Je n’avais pas le choix de dire : mon Dieu que ça marche. »

« Je ne voulais pas que ça existe, conclut Francis Leclerc, mais je me suis laissé convaincre avec un seul visionneme­nt. »

Trente ans après son départ, Félix Leclerc aura donc encore trouvé le moyen d’influencer une oeuvre d’art.

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