Le Journal de Quebec - Weekend
LA TORNADE Amy Schumer
Sur scène, l’humoriste new-yorkaise parle de sexualité, d’aventures, de prostituées et de son corps. À l’écran, l’actrice explore l’amour et les relations mère/fille. Dans les deux cas, elle s’est amplement moquée des conventions. Aujourd’hui, avec Moi, belle et jolie, elle part à la conquête de son image corporelle et répond à nos questions.
Moi, belle et jolie est l’histoire de Renée, incarnée par Amy Schumer, une jeune professionnelle qui travaille dans une prestigieuse compagnie de produits de beauté. « Elle n’a aucune estime d’elle-même », souligne, lors d’une entrevue par courriel, l’actrice et productrice de 36 ans, qui s’est jointe avec enthousiasme au projet développé par le tandem de scénaristes et réalisateurs formé d’Abby Kohn et Marc Silverstein.
« Oui, j’ai participé au scénario et j’ai aussi collaboré aux visuels du film », détaille-t-elle. Car cette comédie dramatique insiste sur la pression que ressentent les femmes à devoir se conformer à un idéal de beauté inatteignable, créant donc de l’insécurité et un constant sentiment de rejet.
Un soir, Renée fait le voeu d’être belle. Le lendemain, lors d’une séance de vélo stationnaire, elle est victime d’un accident : elle tombe sur la tête et se réveille en se pensant aussi parfaite qu’un top-modèle.
« C’est le message du film qui m’a attirée », indique la jeune femme, qui avoue avoir pour objectif de faire en sorte que les gens rient et donc se sentent bien. En jouant sur l’aspect comique de la situation, notamment face à ses meilleures amies Vivian (Aidy Bryant) et Jane (Busy Philipps) qui ne constatent aucun changement chez Renée, Amy Schumer fait passer une réflexion d’importance : la confiance en soi ne dépend pas des autres.
PAS FROID AUX YEUX
Connue pour ses sketches débridés et son franc-parler, Amy Schumer n’a pas l’habitude de pratiquer le politiquement correct. Il en est de même dans Moi, belle et jolie qui ne manque pas de scènes grinçantes.
« C’est moi qui ai insisté pour bouger devant le miroir dans mon Spanx [NDLR : Un sous-vêtement amincissant] et pour danser dans la scène du bikini plutôt que de rester statique. Cela a été un réel plaisir que de travailler avec [Abby et Mark], leur scénario était un excellent outil de départ. »
Dans la scène du bikini, Renée participe à un concours en petite tenue au grand dam de son amoureux (Rory Scovel), qui a peur qu’elle se ridiculise. Mais la danse qu’elle effectue à moitié vêtue et son enthousiasme communica- tif rallient vite l’assistance.
Est-ce cette scène qui a choqué? Est-ce celle dans laquelle elle se déshabille? Ou bien est-ce le fait qu’Amy Schumer – avec ses deux coéquipières et amies dans la vie, Aidy Bryant et Busy Philipps – n’est entourée que d’actrices filiformes? Car le film n’était pas encore sorti que bon nombre d’internautes ont pris l’humoriste à partie sur les réseaux sociaux, l’accusant de dénigrer l’apparence, tant des femmes minces que des femmes plus enrobées.
DES CAROTTES DANS UN BROWNIE
Loin de l’atteindre, ces critiques ont renforcé sa position. « Ça m’a encore plus donné envie que les cinéphiles voient le film. C’est l’histoire d’une femme qui manque d’estime d’elle-même, quelque chose que nous connaissons tous. Et personne n’a le droit de dire si oui ou non quelqu’un devrait avoir des problèmes de confiance en soi. » La scène du Spanx, pour Amy Schumer, a obéi à une volonté très claire de sa part, celle d’ouvrir les yeux des spectateurs. « Les gens ne veulent pas avoir l’impression d’apprendre quelque chose, il faut vraiment bien cacher [la pédagogie]. Un auteur a déjà dit de mon émission de télévision qu’elle était comme de cacher des carottes dans un
brownie ! Et je suis entièrement d’accord avec cette définition, c’est une excellente tactique. »
Il y a trois ans, l’humoriste a organisé des ateliers en collaboration avec The Goodwill Foundation pour que les femmes apprennent à s’habiller et ainsi, à avoir confiance en elles. Aujourd’hui, avec Moi, belle et
jolie, elle poursuit toujours cette mission informelle.
« La majorité de mon travail est lié à une volonté d’autonomiser les femmes grâce à de l’information et de la confiance. Ce film n’est pas différent et oui, c’est une suite logique de cette initiative. » Moi, belle et jolie fait rire et jaser depuis le 20 avril.